Le maire reste l’élu préféré des Français. À quelques mois des municipales, une vaste enquête de l’AMF et du CEVIPOF le confirme : la confiance est là, solide. Mais elle n’a plus rien d’automatique. Car cette confiance s’accompagne désormais d’une attente forte. Plus qu’un élu de proximité, les citoyens veulent un maire exemplaire, à l’écoute, capable de décider sans s’enfermer.
Il y a encore, dans la relation entre les Français et leur maire, quelque chose de particulier. Un mélange d’attachement, d’exigence, de respect souvent silencieux. C’est ce que révèle, très nettement, l’enquête réalisée fin juin 2025 par Ipsos pour l’Association des Maires de France et le CEVIPOF, le centre de recherches de Sciences Po. Près de 6 000 électeurs ont été interrogés. À travers leurs réponses, une chose saute aux yeux : le maire reste le point d’équilibre de la démocratie locale. Mais un point d’équilibre qui doit sans cesse faire ses preuves.
La commune reste le cadre de vie préféré
Deux tiers des personnes interrogées déclarent se sentir profondément attachées à leur commune. Bien plus qu’à leur intercommunalité, leur département ou leur région. Une attache enracinée : plus d’un tiers des personnes interrogées y vivent depuis plus de vingt ans.
Ce n’est pas un repli. Ni une nostalgie. C’est un choix assumé. La grande ville attire peu (15 % des habitants des zones rurales souhaiteraient s’y installer), et les métropoles, encore moins (3 % des ruraux s’y projettent). La commune reste, pour beaucoup, le lieu de l’habitat, du quotidien, mais aussi du repère.
Le maire, figure de confiance… à la condition d’être à la hauteur
Avec 69 % de taux de confiance, le maire devance très largement toutes les autres figures politiques. C’est même le seul élu à susciter une majorité d’opinions favorables. Mais derrière ce chiffre flatteur, les critères d’estime ont évolué.
Ce n’est plus la proximité qui rassure. Ce n’est pas non plus la technicité. Ce que les citoyens attendent, d’abord, c’est de l’honnêteté (61 %) et la capacité à tenir parole (50 %). Viennent ensuite la présence sur le terrain, l’accessibilité, la capacité à gérer les deniers publics avec sérieux.
Et la reconnaissance n’est pas automatique : seuls 20 % des personnes interrogées disent avoir pris contact avec leur mairie durant le mandat. La confiance s’exprime à distance. Elle ne tient pas à une poignée de main ou à une cérémonie. Elle repose sur une exigence de constance et de cohérence.
Le maire sortant ? Oui, s’il a fait ses preuves
58 % des Français souhaitent que leur maire se représente en 2026. Un chiffre stable par rapport à 2019. Et une bonne nouvelle pour celles et ceux qui hésitent à repartir. Mais là encore, le soutien n’est pas un chèque en blanc.
Trois éléments pèsent dans la balance :
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Un bilan tangible : 71 % estiment que leur maire a réalisé des projets importants.
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Un cap pour la suite : autant pensent que leur maire porte encore des projets pour l’avenir.
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Une image saine de la gestion municipale : 73 % jugent les finances locales bien tenues.
Ce jugement est particulièrement favorable dans les communes de moins de 10 000 habitants (78 %), tandis que dans les villes de plus de 100 000 habitants, il tombe à 60 %.
À noter : seuls 4 % des habitants des petites communes jugent l’action municipale “très mauvaise”, contre 14 % dans les grandes villes.
Cette confiance se construit au fil du temps, mais peut se déliter vite. D’où l’importance, pour les élus locaux, de rendre compte, d’expliquer, d’associer.
Car les perspectives d’avenir sont plus nuancées : 15 % des citoyens se disent pessimistes pour leur commune, et 45 % ne se prononcent ni positivement ni négativement. Là encore, le doute s’exprime davantage dans les grandes villes que dans les territoires ruraux.
Ce qui pèsera dans les urnes
Que regardent les électeurs au moment de voter ? Là encore, l’enquête est riche d’enseignements.
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Le programme arrive largement en tête (84 %), devant le bilan (79 %) et la personnalité du maire (79 %).
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L’étiquette politique, longtemps marginale dans les petites communes, progresse : 61 % des personnes interrogées disent qu’elle comptera dans leur choix, contre 53 % en 2019.
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Le renouvellement des équipes (58 %) et la présence de proches sur les listes (50 %) jouent aussi un rôle.
Le local se politise de nouveau, en particulier dans les villes moyennes et grandes. Mais la personnalité, l’histoire locale, la clarté du projet restent déterminants.
Une écologie attendue sur le terrain
Si la transition écologique recule dans les priorités affichées (38 %, contre 47 % en 2019), l’attente d’actions tangibles, proches du quotidien, demeure très forte. Les citoyens ne veulent pas forcément de grands discours, mais des changements visibles, utiles, à leur échelle.
Mais cette attente se double d’une autre priorité forte : la sécurité. Pour 43 % des citoyens, la tranquillité publique arrive en tête des attentes vis-à-vis du futur maire. Viennent ensuite la préservation de l’environnement (38 %) et le maintien des services de proximité.
Ce qu’ils attendent en priorité :
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La rénovation énergétique des bâtiments publics (37 %)
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Davantage d’espaces verts (30 %)
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Des pistes cyclables, des transports accessibles (29 %)
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Un engagement sur les énergies renouvelables (28 %)
L’environnement reste un marqueur, à condition d’être incarné localement.
Un maire à l’écoute, pas au-dessus
Une très large majorité de Français attend que le maire défende les intérêts de la commune face à l’État (87 %). Mais cela ne suffit plus. Il doit aussi :
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Garantir la transparence des décisions (83 %)
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Favoriser le consensus (74 %)
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Servir de médiateur en cas de conflit local (69 %)
La transparence apparaît comme une attente essentielle. 83 % des personnes interrogées estiment qu’il est très important de rendre publics les débats avant toute prise de décision. C’est davantage encore que la médiation en cas de conflit ou l’amélioration des services municipaux.
Le maire attendu en 2026 n’est pas seulement un décideur. Il est un facilitateur, un tisseur de liens.
Une envie d’agir, mais peu de place pour le faire
Là aussi, le constat est nuancé. Si seuls 14 % des citoyens participent réellement à la vie de la commune, ils sont nombreux à en avoir l’envie :
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23 % se disent prêts à s’impliquer
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35 % aimeraient le faire, mais n’en trouvent pas le temps
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Seuls 28 % n’envisagent aucun engagement
Les marges d’activation citoyenne sont réelles. Encore faut-il que les élus sachent ouvrir des espaces, sans se contenter de formalités.
Ce qu’il faut retenir
Les Français restent très attachés à leur commune et à leur maire.
La confiance est forte, mais elle est exigeante, construite sur l’éthique et la cohérence.
Le bilan et le projet local comptent davantage que l’étiquette, mais celle-ci progresse.
Les attentes sur l’écologie, la sécurité et la gestion locale sont précises.
Les citoyens veulent être associés. Pas seulement entendus.
La démocratie locale n’a pas déserté les territoires. Mais elle n’a plus rien d’automatique. Confiance et participation vont de pair avec exigence et responsabilité.
En 2026, les maires ne seront pas seulement élus pour ce qu’ils ont fait, mais pour la manière dont ils l’ont fait.
Consulter l’enquête complète sur le site de l’AMF.