UN STATUT DE L’ÉLU LOCAL ENFIN CONSACRÉ

Après des années d’alertes venues du terrain et de débats parlementaires, la loi créant un véritable statut de l’élu local a été définitivement adoptée. Le vote conforme intervenu en seconde lecture le 8 décembre marque une étape importante pour les élus communaux et intercommunaux, confrontés à un engagement toujours plus exigeant.

Ce texte répond à une réalité largement partagée. L’exercice d’un mandat local repose encore trop souvent sur un équilibre fragile entre vie professionnelle, vie personnelle et responsabilités publiques. Pour la première fois, la loi appréhende de manière globale le parcours de l’élu, de l’entrée dans l’engagement jusqu’à la sortie du mandat.

Lever les freins à l’engagement

La loi vise d’abord à rendre les fonctions électives plus accessibles, notamment pour les actifs. Le congé électif des salariés est doublé et porté à vingt jours. Des modules d’information gratuits sont mis à disposition des futurs candidats, complétés par des sessions que les collectivités devront organiser en début de mandat afin de clarifier droits, devoirs et responsabilités.

Des avancées concernent également les étudiants et les personnes en situation de handicap, avec un élargissement du remboursement des frais et une facilitation de l’aménagement du poste de travail.

Sur la question des incompatibilités de mandat, le texte supprime l’interdiction qui frappait jusqu’ici les salariés d’une commune membre d’une intercommunalité devenant élus communautaires. Une évolution qui n’est pas exempte de réserves. Plusieurs associations d’élus ont souligné, lors des débats parlementaires, que les risques de conflits d’intérêts demeurent, compte tenu de l’imbrication croissante des compétences et des décisions entre communes et intercommunalités.

Sécuriser l’exercice des responsabilités locales

Le cœur de la réforme concerne les conditions d’exercice du mandat. Les indemnités de fonction sont revalorisées pour certaines strates de communes, en particulier les plus petites, où la charge pesant sur les maires est souvent la plus lourde. Le texte clarifie également les règles de calcul et de plafonnement des indemnités, en tenant compte des autres fonctions publiques exercées.

Il consacre le principe d’indemnités maximales pour les présidents d’intercommunalités, sauf décision contraire du conseil communautaire, et supprime certains seuils qui limitaient jusqu’à présent l’adaptation des indemnités des conseillers communautaires à leur participation effective.

Les conditions matérielles d’exercice du mandat sont renforcées. Le congé de formation est étendu, les autorisations d’absence facilitées, et le remboursement des frais élargi, notamment pour la garde d’enfants ou l’assistance aux personnes dépendantes. La loi permet également aux élus en congé maladie ou maternité de poursuivre leur mandat en cumulant indemnités journalières et indemnités de fonction.

Dans un contexte de recrudescence des agressions visant les élus, l’automaticité de la protection fonctionnelle en cas de menaces ou de violences constitue une avancée particulièrement attendue par les élus de terrain. Le texte sécurise par ailleurs la tenue des bureaux des intercommunalités et syndicats en visioconférence, tout en confirmant les règles existantes d’élection de leurs membres.

Les collectivités devront enfin organiser, dans les six premiers mois du mandat, une session d’information obligatoire à destination de l’ensemble des élus, portant notamment sur leurs droits, leurs obligations et les règles déontologiques applicables.

Mieux accompagner la fin de mandat

La loi intègre également la question, longtemps négligée, de la sortie du mandat. L’allocation différentielle de fin de mandat est étendue à deux ans. Un contrat de sécurisation de l’engagement est créé pour faciliter le retour à l’emploi, tandis qu’un certificat de compétences professionnelles permet de valoriser l’expérience acquise.

Le texte favorise la validation des acquis de l’expérience liés à l’exercice d’un mandat local et améliore le régime de retraite, avec l’introduction d’une bonification d’un trimestre par mandat complet.

Clarifier la prise illégale d’intérêt

Parmi les dispositions les plus structurantes figure la redéfinition pénale de la prise illégale d’intérêt. Le texte exclut explicitement les situations impliquant plusieurs intérêts publics, renforce l’exigence d’un élément intentionnel et protège les élus qui ne pouvaient agir autrement pour répondre à un motif impérieux d’intérêt général.

Cette évolution sécurise notamment les élus mandatés pour représenter leur collectivité au sein d’organismes extérieurs, publics ou privés, dès lors qu’ils n’en retirent aucune rémunération et hors champ de la commande publique. Les parlementaires ont également précisé que la détention de plusieurs mandats au sein d’organes délibérants ne saurait, à elle seule, caractériser un intérêt personnel, ni remettre en cause la légalité d’une délibération du seul fait de la présence d’un élu en séance.

Ces clarifications s’inscrivent dans un travail de fond mené de longue date par les associations nationales d’élus, qui alertaient sur les effets paralysants du cadre juridique antérieur pour de nombreux élus de bonne foi.

Une traduction législative d’une réalité de terrain

Avec ce texte, les difficultés concrètes rencontrées par les élus locaux trouvent enfin une traduction législative. En sécurisant les parcours, en améliorant les conditions d’exercice et en clarifiant le cadre juridique, la loi sur le statut de l’élu local constitue une avancée importante pour la démocratie de proximité.

Elle ne règle pas tout, mais elle marque un tournant. Celui d’une reconnaissance plus juste de l’engagement local, sans lequel aucune politique publique ne peut durablement tenir.

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