Breizh’Alim : une démarche innovante en faveur d’une politique d’achats publics territoriale

La région Bretagne, l'Etat et la Chambre d'agriculture ont initié depuis plusieurs mois la démarche Breizh'Alim qui se met en marche progressivement sur la région. Cette démarche vise, en premier lieu, à valoriser, par la commande publique, l'achat local de denrées alimentaires dans les établissements scolaires de Bretagne.

Hind Saoud, conseillère régionale en charge de la commande publique et de la politique d'achat nous explique cette démarche innovante.

Pouvez-vous nous expliquer la démarche Breizh’Alim, initiée par la Région Bretagne, démarche novatrice engagée en faveur d'une politique d'achats publics territoriale ?
La démarche Breizh’Alim a été initiée par la Région Bretagne en partenariat avec l’Etat et la Chambre régionale d’agriculture. Elle consiste à valoriser l’écosystème territorial agro-alimentaire en rapprochant l’offre et la demande en matière d’achats publics de denrées alimentaires. Au regard du contexte de crise agricole, des attentes envers les pouvoirs publics de la part des agriculteurs mais aussi des citoyens, il s’agit pour nous de créer les conditions d’un approvisionnement de qualité et de proximité dans la restauration collective dépendant des collectivités territoriales et de l’Etat.
Partant du principe que l’acte d’achat doit être un acte économiquement responsable, Breizh’Alim allie plusieurs enjeux :
- Ancrage territorial alimentaire
- Economie locale
- Education alimentaire
- Développement durable
- Modernisation des pratiques d’achats
Cette démarche est novatrice dans le sens où elle sera profitable à tous (citoyens, opérateurs économiques, acheteurs publics des collectivités territoriales et de l’Etat) par les outils qu’elle va déployer, le partage d’une ingénierie contractuelle innovante, la visibilité et la lisibilité des initiatives locales…

Quels sont les produits concernés par cette démarche ?
Dans le cadre de Breizh’Alim, nous avons une attention particulière pour les produits que sont le porc, le lait, les œufs et les produits de la mer. Toutefois, la démarche n’est pas exclusive, l’ensemble des filières seront associées.

Comment rapprocher l’offre de la demande au sein de la filière alimentaire ?
Breizh’Alim a une approche de concertation avec les acteurs concernés de notre territoire afin de fédérer les initiatives locales et de construire un projet collectif au service d’une politique alimentaire responsable.
La région Bretagne a initié une journée de travail et d’échanges (Bar Camp du 8 décembre 2016 « La commande publique augmentée par la donnée : l’exemple de l’approvisionnement en restauration collective »). Elle a mis en place un comité de pilotage regroupant l’Etat en région (SGAR, DRAAF), la Chambre régionale d’agriculture, le Rectorat, le Comité académique de l’enseignement catholique, les conseils départementaux, les associations départementales des maires de France, les collectivités territoriales porteuses d’un Projet Alimentaire Territorial qui le souhaitent. Elle est présente aux rencontres initiées par la Chambre régionale d’agriculture (ex : Convention d’affaires récemment à Quimper). Elle répond aux sollicitations des collectivités territoriales et celles d’opérateurs économiques agricoles.
La concertation et le dialogue afin de fédérer sont nécessaires si nous voulons amplifier le mouvement vers des systèmes alimentaires territorialisés et qu’il se déploie sur l’ensemble de notre territoire breton. Fédérer les initiatives afin de mutualiser les outils, les organisations est indispensable à un approvisionnement de qualité et de proximité efficient. Il n’est pas rare que les intentions soient bonnes, que les volontés politiques soient fortes mais que la réalité du terrain rend inatteignable les objectifs fixés.
Une feuille de route opérationnelle a donc été adoptée. Elle comporte plusieurs axes d’interventions dont :
- Organiser le rapprochement de l’offre et de la demande au sein de la filière alimentaire grâce à un espace numérique de mise en réseau des acheteurs publics et des opérateurs économiques.
- Sourcer et structurer l’offre : la Chambre régionale d’agriculture mènera une campagne de sourcing sur le territoire régional. Elle accompagnera les filières dans l’adaptation aux demandes
- Suivre et piloter en temps réel l’achat de denrées alimentaires en restauration collective au travers l’observatoire régional de la commande publique
S’appuyant sur l’existant (outils juridiques, numériques, guides etc), ces nouveaux outils pourront être utilisables par tous et proposeront des informations précises et fiables à l’échelle régionale. Il s’agira aussi d’atteindre collectivement des volumes d’achats significatifs autour d’indicateurs qualitatifs afin d’avoir un véritable effet levier auprès des opérateurs économiques (agriculteurs, transformateurs, distributeurs).

La Région met-elle déjà en application ce principe d’achat public territorial pour ses lycées ?
Breizh’Alim est une démarche transversale au sein de la région Bretagne. Elle intègre entre autres les enjeux de nos politiques économiques, agricoles et agroalimentaires, environnementales ou encore celles de la commande publique et celles des lycées. Breizh’Alim s’applique donc avant tout au Conseil régional qui l’a adoptée dans le cadre de son bordereau dédié à la politique d’achat de la région en session de février 2017.
Avec 116 lycées publics, la région sert 3 millions de repas par an à plus de 100 000 jeunes, internes ou demi-pensionnaires. Il est donc essentiel que nos lycées soient fer de lance dans cette démarche.
Toutefois la mise en œuvre de celle-ci n’est pas aussi évidente que pour une commune qui a en gestion directe ses écoles. En effet, la région tout comme les départements n’achètent pas directement les denrées alimentaires distribuées au sein de leurs établissements. Il existe 5 groupements de commandes des collèges et des lycées en Bretagne gérés par des gestionnaires de lycées. La part des groupements de commande est estimée à 60% des achats, les gestionnaires des établissements gérant en direct les 40% restants.
Dès le lancement de Breizh’Alim, nous avons donc associé le Rectorat (ainsi que l’enseignement catholique) et les départements. Nous avons aussitôt proposé de mener une expérimentation sur le plus important des groupements de commande à savoir celui de Bréquigny en Ille-et-Vilaine. Des questions autour des notions de traçabilité et d’origine ont été abordées ainsi que sur l’évolution des cahiers des charges. Un accompagnement régional a été effectué pour la rédaction du marché de fournitures de denrées alimentaires. Des enseignements seront tirés de cette expérimentation afin de généraliser la démarche aux autres groupements dans le cadre de négociations avec les départements et le Rectorat.
Parallèlement à cet accompagnement, une charte qualité est en cours d’élaboration. Elle a vocation à décliner les orientations régionales en matière d’éducation alimentaire, de santé publique, de lutte contre le gaspillage alimentaire.

Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire pour les collectivités locales que sont les communes ou les Départements et comment peuvent-elles s’emparer de la démarche ?
Breizh’Alim a vocation à fédérer les initiatives locales et non pas à imposer « un modèle alimentaire breton». Ces initiatives sont nombreuses et parfois remarquables. L’idée est que chaque territoire et chaque bretonne et breton profitent de ces dynamiques locales qui pour beaucoup se retrouvent sur l’essentiel (notamment dans le cadre des PAT).
Pour ce faire, la structuration de l’offre doit rencontrer une demande significative et spécifique celle de la restauration collective. Certaines demandes trouvent satisfaction dans des logiques de circuits courts. Or d’autres nécessitent une organisation à une échelle qui dépassent la commune, l’intercommunalité, le département voire la région. Il s’agit alors de permettre la satisfaction de l’ensemble des besoins des acheteurs publics dans un esprit de responsabilités économiques, sociales et environnementales partagées. Il s’agit en outre de rendre visible et lisible pour les opérateurs économiques et les citoyens les achats alimentaires des acheteurs publics. Inversement, les acheteurs publics auront une meilleure connaissance des ressources du territoire breton.
Notre souhait est de porter avec l’Etat, les collectivités et les acteurs concernés une « gouvernance alimentaire régionale » partagée.
Breizh’Alim n’est qu’à ses prémisses. La démarche se veut innovante, pragmatique et collective. Chaque territoire et chaque acteur public et /ou privé ont une responsabilité dans la réussite de nos orientations communes. A chacun d’y prendre toute sa place, on les y attend !

 

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