Les conseillers municipaux n’appartenant pas à la majorité : clefs de voûte du débat local et de la démocratie
Tous les conseiller.es ont les mêmes droits
Avant même de vous citer dans cet article quelques droits fondamentaux bien souvent oubliés, j’aimerais vous rappeler cher.es consœurs et confrères de « l’opposition » que notre rôle est essentiel au bon fonctionnement de la démocratie. Et bien que souvent taxés « d’élu.es de seconde zone », « d’opposition systématique », « procéduriers », « coupable d’attaques personnelles » et autres sobriquets plus ou moins admis par les lois luttant contre la diffamation, nous sommes, nous, élu.es de « l’opposition », le seul rempart contre les prises illégales d’intérêts, les petits arrangements entre élu.es et l’oubli de cette plus ou moins grande part de la population qui nous ont fait élire. Car oui, vous êtes élu.es, conseiller.e municipal.e comme les autres conseiller.es de la majorité. L’occasion de rappeler que le terme « opposition » ou « minoritaire » n’ont aucun fondement juridique. En effet, il n’y qu’un seul type de conseiller.e municipal.e, comme il a été défini dans une question écrite au Sénat (N°5619 du 25/09/2008); nous sommes « des conseillers municipaux et conseillères municipales n’appartenant pas à la majorité ».
Si vous n’avez pas la majorité permettant d’imposer un débat et de voter majoritairement une délibération, vous avez cependant d’autres outils pour faire entendre votre voix. Des outils que je l’espère vous aurez pris soin de faire consigner dans le règlement intérieur du conseil municipal. Si toutefois ce n’est pas le cas, sachez que les règlements intérieurs fonctionnent comme les contrats de travail ; une règle qui y est donnée pourra être plus favorable mais ne pourra être désavantageuse par rapport à la convention collective.
Faire naître les débats
Vous pensez ne pas pouvoir aborder des sujets qui vous sont chers en conseil ? Détrompez-vous.
Voici 3 outils que le droit vous offre en complément des débats ordinaires :
La mise à l’ordre du jour (art L2121-10 du CGCT) : Tout élu.e bénéficie d’un droit de proposition de mise à l’ordre du jour d’une délibération qu’il aura lui-même rédigé. Sa demande doit être faite plusieurs jours à semaines avant le conseil, auprès du maire. Le ou la maire pourra bien évidement refuser la demande mais devra le justifier. Le ou la maire ne pourra cependant pas porter une atteinte excessive aux droits des conseiller.es municipaux.ales.
Les questions orales (art L2121-19 du CGCT) : Elles sont elles aussi à adresser par écrit au maire ou à la maire dans un délai raisonnable (prévu dans le règlement) avant le conseil. Un ou une maire ne pourra pas vous empêcher de lire votre question à moins d’user de son pouvoir de police (trouble à l’ordre public par exemple). Ce sera donc l’occasion pour vous d’aborder un sujet qui n’est pas à l’ordre du jour. Votre question, et la réponse du ou de la maire seront consignées au procès-verbal de la séance.
Le débat portant sur la politique générale de la commune (art L2121-19 du CGCT) : A la demande d’un dixième des conseiller.es municipaux.ales, le maire devra organiser pour le conseil suivant un débat sur la politique qu’il mène. Ce débat pourra être sollicité une fois par an.
Porter les débats
Maintenant que le débat est rétabli ou du moins nourri, il est important de se prémunir de toutes déformations des propos. La nouvelle réglementation en matière de rédaction des procès-verbaux va sans doute alléger le travail des secrétaires de mairie mais va également ouvrir des brèches quant à la conformité de la restitution des débats ? C’est pourquoi, je vous préconise 2 actions.
Se porter secrétaire de séance (L2121-15 du CGCT) : En se portant secrétaire de séance, vous serez destinataire du procès-verbal pour relecture avant le prochain conseil municipal. Une tâche utile pour relever et faire corriger des prises de paroles qui ne seraient pas conformes aux propos tenus.
Enregistrer ou filmer les conseils municipaux et les diffuser (L2121-18 du CGCT) : Vous avez en effet tout à fait le droit d’enregistrer ou de filmer et de diffuser l’intégralité du conseil municipal. Le conseil municipal est une séance publique et les élu.es que vous filmerez sont considérés comme des personnages publics dans l’exercice de leur mandat, ils ne peuvent donc pas prétendre à un éventuel droit à l’image dans ce contexte. Vous prendrez toutefois garde, si vous filmez, à ne pas diffuser les images du public et des agent.es présent.es.
Article de Clarisse RÉALÉ – Conseillère municipale à Châteaulin