Les intercommunalités sont confrontées à des turbulences sans précédent. Entre retards de la loi de finances, coupes budgétaires et réformes imposées, les élus locaux naviguent à vue. Mardi 21 janvier, lors de la « Journée Finances » d’Intercommunalités de France, Sébastien Miossec, président de Quimperlé Communauté et président délégué de l’association, a livré une analyse sans détour : « Nos marges de manœuvre se réduisent chaque jour. »
Alors que les collectivités tentent de gérer des budgets déjà fragilisés, un nouvel obstacle est venu compliquer la donne : le retard de la publication des dotations globales de fonctionnement. Privées de ces informations essentielles, elles peinent à boucler leurs budgets dans un climat où la loi de finances 2025 s’enlise dans les méandres parlementaires. Sébastien Miossec a exprimé son inquiétude lors de cette table ronde : « Près des deux tiers de nos recettes dépendent de décisions nationales. Cette dépendance nous laisse peu de place pour anticiper. »
Les difficultés ne s’arrêtent pas là. Les coupes imposées par le projet de loi de finances, même réduites à 2,2 milliards d’euros contre les 5 milliards initialement annoncés, continuent de peser lourdement sur les territoires. À cela s’ajoute la hausse des cotisations patronales au régime de retraite des fonctionnaires territoriaux, une mesure qui viendra mécaniquement alourdir la masse salariale. Une équation budgétaire déjà complexe, devenue quasiment intenable.
Face à ces contraintes, les choix deviennent brutaux. À Quimperlé Communauté, Sébastien Miossec a indiqué que seules « une dizaine de millions d’euros » du plan pluriannuel d’investissement, sur un total de 50 millions, pouvaient être ajustés à court terme. « Mais ces économies n’auront d’impact concret que d’ici 2027 ou 2028, en raison des délais nécessaires à la mise en œuvre des projets », a-t-il expliqué. Cette inertie budgétaire s’ajoute à une pression croissante sur les services publics. Dans certaines collectivités, des reports de vote budgétaire ont été décidés pour permettre une revue complète des dépenses et sensibiliser la population aux réalités financières.
Les retards dans l’allocation des crédits d’investissement, comme la dotation de soutien à l’investissement local et la dotation d’équipement des territoires ruraux, aggravent encore la situation. Bien que la DGCL ait tenté de rassurer sur un déblocage des fonds d’ici février, les incertitudes continuent de peser lourdement. « Nous devons composer avec des règles budgétaires mouvantes. C’est un véritable test de résilience pour les territoires », a déclaré Sébastien Miossec, appelant à davantage de prévisibilité de la part de l’État.
Mais au-delà des critiques, cette crise est aussi l’occasion de repenser les priorités. Pour Sébastien Miossec, les arbitrages budgétaires ne doivent pas seulement répondre à l’urgence, mais préparer l’avenir. Les intercommunalités doivent redoubler d’efforts pour maintenir les services publics essentiels tout en ajustant leurs stratégies d’investissement. Son message est clair : si les moyens financiers sont limités, l’action collective et la lucidité des élus restent des leviers indispensables pour surmonter les chocs à venir. « Nos territoires ne peuvent être réduits à des variables d’ajustement », a-t-il affirmé lors de la table ronde.
Alors que la loi de finances 2025 continue de cristalliser les tensions, les élus locaux avancent, contraints mais déterminés. Pour Sébastien Miossec, cette période charnière révèle à la fois la fragilité et la résilience des intercommunalités. En dépit des incertitudes, l’objectif demeure : protéger les services publics, garantir les investissements stratégiques et maintenir une cohésion territoriale face à des défis d’une ampleur inédite.
Journée finances 2025 : budgets intercommunaux face aux chocs. La table ronde en vidéo avec la participation de Sébastien Miossec