Les débats sur le Zéro Artificialisation Nette s’enchaînent, et l’étau réglementaire continue de crisper les élus locaux. Alors que le Sénat s’apprête à examiner la proposition de loi Trace, portée par des sénateurs centristes et Républicains, la question de l’échéance de 2031 se retrouve au centre des tensions. Entre impératif écologique et contraintes territoriales, la bataille est loin d’être tranchée.
La loi Trace, un assouplissement controversé
En ligne de mire de cette proposition : le calendrier imposé par la loi Climat et Résilience. Depuis 2021, les collectivités doivent réduire de moitié leur consommation foncière d’ici 2031, avant d’atteindre l’objectif de zéro artificialisation nette en 2050. Une trajectoire jugée trop brutale par de nombreux élus locaux, qui peinent à concilier préservation des terres et développement économique.
La loi Trace propose un changement radical. L’échéance de 2031, considérée comme une contrainte excessive, serait purement et simplement supprimée. Chaque territoire avancerait à son rythme, avec un seul objectif final en 2050. Une définition plus souple de l’artificialisation des sols est également envisagée, ce qui pourrait laisser davantage de marges de manœuvre aux collectivités.
Une approche qui inquiète une partie de la gauche, notamment Simon Uzenat, sénateur socialiste du Morbihan. Supprimer l’échéance intermédiaire reviendrait, selon lui, à vider le ZAN de sa substance. Loin d’une simple question de calendrier, cette réforme risquerait de repousser indéfiniment les efforts nécessaires pour limiter l’étalement urbain et préserver les terres agricoles.
Des élus locaux face aux réalités du terrain
Si les débats restent vifs au Sénat, les élus locaux, eux, sont confrontés aux difficultés concrètes d’application du ZAN. Sébastien Miossec, maire de Riec-sur-Bélon et vice-président d’Intercommunalités de France, insiste sur un point central : les moyens manquent. Recycler les friches, densifier les centres urbains, favoriser la renaturation… autant de solutions théoriquement encouragées, mais qui nécessitent des financements lourds. Or, sans accompagnement suffisant, ces ambitions restent hors de portée pour les collectivités.
Dans les territoires, les tensions sont palpables. Entre l’objectif écologique et la nécessité de loger les populations, le compromis s’annonce difficile.
Un modèle breton déjà en place
Alors que le Sénat débat d’un éventuel assouplissement, la Bretagne a déjà engagé une réflexion pragmatique. Le Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) fixe une trajectoire adaptée aux réalités locales. Plutôt qu’une approche uniquement réglementaire, la stratégie repose sur une combinaison entre renaturation, compensation foncière et soutien au renouvellement urbain.
Un équilibre qui fait écho aux préoccupations exprimées par les élus socialistes. Simon Uzenat défend la nécessité de garder des objectifs clairs, tandis que Sébastien Miossec et les élus locaux insistent sur l’accompagnement des collectivités. Si le ZAN ne peut être abandonné, sa mise en œuvre demeure le véritable enjeu.
Un équilibre encore à trouver
Alors que le Sénat s’apprête à trancher, le clivage entre régulation nationale et adaptation locale reste entier. Derrière les débats législatifs, les élus locaux attendent des solutions concrètes : moins de rigidité, plus de financements. Reste à savoir si Paris entendra cet appel.
Pour aller plus loin, consultez ci-dessous la proposition de loi Trace adoptée en commission des affaires économiques du Sénat.