Yannick Morez, maire de Saint-Brévin a, après des mois d’insultes et de menaces demandé sa démission au préfet dans la soirée du mercredi 10 mai. L’édile dit avoir pris sa décision « pour des raisons personnelles », en raison notamment du « manque de soutien de l’État ».
La démission de Yannick Morez, victime d’un incendie criminel, a provoqué une indignation générale auprès des élu.es et des associations qui les représentent. Beaucoup ont mis en cause l’absence de réaction de la part de l’État et ont appelé à une réponse pénale plus sévère vis-à-vis des auteurs de violences. Pourtant, depuis plusieurs années, Député.es, Sénateurs et Sénatrices, et associations n’ont cessé d’alerter sur ce phénomène.
À l’origine des faits, un projet de déplacer près d’une école publique maternelle et élémentaire, le Centre d’accueil de demandeurs d’asile (Cada) qui avait ouvert dans la station balnéaire en 2016 après le démantèlement de la « jungle de Calais ».
Plusieurs manifestations contre ce projet de déménagement avaient été organisées, dont la dernière fin avril, à l’appel de l’extrême-droite. En particulier la mouvance autour de « Reconquête », le parti d’Éric Zemmour. Parmi les opposants au centre de demandeurs d’asile, Bernard Germain, un candidat de « Reconquête » aux dernières législatives dans les Côtes d’Armor.
Mercredi soir durant la séance nocturne à l’Assemblée Nationale, alors que les député.es débattaient sur la création d’une commission d’enquête sur les groupuscules auteurs de violence, le député Jérôme Guedj (PS) a évoqué l’affaire et rendu hommage à Yannick Morez « victime d’un terrorisme d’extrême droite ». Les député.es présent.es se sont levé.es et ont applaudi à l’exception notable du Rassemblement National…
Ce matin, pendant que le pays découvrait au réveil l’information, le chef de l’État et son gouvernement se réveillaient timidement d’une longue léthargie. « Des attaques indignes », c’est le terme choisi par Emmanuel Macron en fin de matinée dans un tweet aussi tiède que tardif. Même si tout l’exécutif était unanime ce jeudi 11 mai, pour condamner l’incendie criminel du domicile de Yannick Morez.
Les réactions ont afflué après cette démission, notamment celles des associations d’Élu.es. «Inacceptable » pour l’Association des Maires de France (AMF). « Aucune menace, ni a fortiori aucune violence, n’est légitime envers les élu.es, quelle qu’elle soit » a ajouté l’Association des Petites Villes de France (APVF). Car cet épisode remet en lumière la persistance, voire l’augmentation, des violences physiques et verbales envers les élu.es, et principalement les maires. « Dans ces circonstances, les maires doivent être soutenus par des actes, et non seulement des paroles encourageantes. L’AMF les accompagne dans leurs démarches mais cela ne peut suffire. Entre la prévention et le suivi pénal, tout doit être mis en œuvre : c’est désormais une urgence », a plaidé l’Association des Maires de France.
La Première ministre a réitéré sa « volonté de mieux protéger les maires, de répondre plus efficacement quand il y a des menaces. Cela répond à une vraie problématique. On va continuer à renforcer notre action pour intervenir plus tôt pour pouvoir soutenir les maires, repérer leurs difficultés et mieux les accompagner face des violences », a-t-elle déclaré alors que Yannick Morez sera reçu dans les prochains jours à Matignon.
Dans cette perspective, l’APVF demande d’ores-et-déjà au « ministre de la Justice de mobiliser les Parquets et de s’assurer qu’une enquête systématique effective et approfondie est menée dans tous les cas où une plainte est déposée par un.e élu.e pour des faits subis dans l’exercice de ses fonctions. Force est de constater que, malgré deux circulaires dans ce sens, l’action publique n’est pas toujours engagée avec la célérité et l’ampleur requises » a regretté l’association dirigée par Christophe Bouillon (PS).
L’Association des Petites Villes de France mise également sur la création annoncée par la ministre des collectivités, d’une cellule d’analyse et de lutte spécifiquement dédiée aux atteintes des élu.es, au sein du ministère de l’Intérieur. « L’APVF veillera à ce que cette cellule, dont la création est bienvenue, soit rapidement dotée des moyens techniques et humains lui permettant de mener à bien le travail d’identification, de relais et de mobilisation dont les élu.es victimes ont besoin ».
A plus ou moyen terme, l’AMF pour sa part, « réitère son appel à mener un travail conjoint avec l’exécutif pour apporter des réponses à la hauteur des enjeux ». Le dossier devrait vite remonter en haut de la pile des travaux que la ministre déléguée aux collectivités territoriales compte mener avec l’association. « Avec David Lisnard, nous avons convenu de travailler ensemble pour aborder non pas uniquement leur statut mais l’ensemble de la vie quotidienne des élu.es ». Retraites, indemnités, violences subies, simplifications administratives… L’idée est d’aller chercher un maximum de propositions sur ces enjeux et d’apporter des réponses concrètes rapidement.