Remaniement ministériel : Un jeu de trônes entre fidèles

Jeudi 20 juillet, en début de soirée, les détails du remaniement ministériel ont été officiellement annoncés. Malgré les tentatives de la Première ministre pour élargir politiquement sa majorité, le gouvernement proposé reste resserré autour de ses fidèles, marquant ainsi l’échec des ministres issus de la société civile. Voici un tour d’horizon des changements.

Huit ministres sortants ont quitté leurs postes, tandis que huit nouveaux entrent au gouvernement et trois ministres changent de portefeuille. Ce remaniement n’est ni un simple ajustement, comme souhaité initialement par le chef de l’État, ni un bouleversement complet du gouvernement, puisque les ministres clés sont restés en place. Élisabeth Borne reste ainsi Première ministre, tout comme Bruno Le Maire à l’Économie, Gérald Darmanin à l’Intérieur et Éric Dupont-Moretti à la Justice. Christophe Béchu conserve son super-ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, tandis qu’Olivier Dussopt et Stanislas Guerini restent respectivement ministre du Travail et de la Transformation et de la Fonction publiques.

Parmi les sortants, deux ministères importants voient leur locataire se retirer : l’Éducation nationale et la Santé. Les deux ministres concernés, Pap Ndiyae et François Braun, quittent leur poste un an après leur nomination, n’ayant pas réussi à convaincre. Ils étaient tous deux issus de la société civile et n’avaient pas une expérience politique préalable. Jean-Christophe Combe, également issu de la société civile en tant qu’ancien patron de la Croix rouge, quitte le ministère des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées. Isabelle Rome, peu visible à l’Égalité entre les femmes et les hommes, est également remplacée, tout comme l’ancien préfet Jean-François Carenco aux Outre-mer et l’ancien maire de Clichy-sous-Bois, Olivier Klein, au Logement et à la Ville. Marlène Schiappa, jusqu’à présent chargée de l’Économie sociale et solidaire depuis 2017, quitte également le gouvernement en raison de sa gestion du Fonds Marianne. À noter qu’actuellement, l’économie sociale et solidaire et la vie associative ne sont plus représentées au gouvernement, aucun ministre ou secrétaire d’État n’étant officiellement chargé de ces questions. Cependant, Olivia Grégoire a annoncé sur Twitter que le périmètre de son poste serait élargi pour inclure l’ESS.

Parmi les départs, le seul qui est volontaire est celui de Geneviève Darrieussecq, qui était chargée des Personnes handicapées et qui avait demandé à quitter ses fonctions.

Plusieurs ministres restent au gouvernement mais changent de portefeuille. La promotion la plus notable est celle de Gabriel Attal, qui passe du Budget à l’Éducation nationale, en remplacement de Pap Ndiyae. Il devient ainsi le plus jeune ministre à avoir jamais occupé ce poste rue de Grenelle. Bérangère Couillard, qui était jusqu’à hier secrétaire d’État chargée de la Biodiversité, prendra désormais le poste de ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, succédant à Isabelle Rome. Sarah El Haïry, qui s’occupait de la Jeunesse et du Service universel, devient quant à elle secrétaire d’État à la Biodiversité.

Enfin, huit nouvelles personnalités font leur entrée au gouvernement. Aucune d’entre elles n’est issue de la société civile, l’expérience passée ayant été jugée peu concluante. Les nouveaux entrants sont tous issus de la haute fonction publique, sont députés ou ont été maires.

Le haut fonctionnaire Aurélien Rousseau prend le ministère de la Santé et de la Prévention. Ancien professeur d’histoire devenu énarque et membre du Conseil d’État, l’homme de 47 ans a été directeur de l’ARS d’Île-de-France pendant l’épidémie de covid-19, avant de devenir directeur de cabinet d’Élisabeth Borne jusqu’à récemment.

Plusieurs députés méritants de la majorité ont également été promus au gouvernement pour leur engagement actif à l’Assemblée ou dans les médias lors de la difficile réforme des retraites. Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale, devient ministre des Solidarités et des Familles. Prisca Thévenot, députée des Hauts-de-Seine, est nommée à la Jeunesse et au Service national universel.

Le haut fonctionnaire et énarque Thomas Cazenave, qui a déjà travaillé avec Emmanuel Macron lorsqu’il était à Bercy sous François Hollande et qui est député de la Gironde depuis 2022, prend en charge le ministère du Budget (Comptes publics), un poste sensible. Il sera chargé de porter le projet de loi de finances pour 2024 dès la rentrée. Ayant été président de la délégation aux collectivités territoriales de l’Assemblée nationale, il est bien informé des problématiques spécifiques liées aux collectivités.

D’autres députés fidèles de la majorité font leur entrée au gouvernement : Fadila Khattabi devient ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, et Sabrina Agresti-Roubache devient secrétaire d’État chargée de la Ville, sous la cotutelle du ministère de l’Intérieur.

Parmi les nouveaux entrants, deux ont une expérience de maire, l’un ayant été maire par le passé et l’autre étant actuellement maire. Philippe Vigier, nommé ministre délégué chargé des Outre-mer et membre du Modem, a été maire de Cloyes-sur-le-Loir (Eure-et-Loir) et président de la Communauté de communes. Patrice Vergriete, maire divers gauche de Dunkerque et président de sa communauté urbaine, est choisi pour devenir ministre délégué chargé du Logement. Il est un spécialiste reconnu des questions d’urbanisme et des collectivités locales.

Cependant, on remarque que la Première ministre n’a pas choisi de ministre ultramarin pour le poste des Outre-mer, ce qui est interprété comme un « mauvais signal » par les élus d’outre-mer.

Ce remaniement ministériel confirme l’évidence d’une poursuite des mêmes politiques, laissant présager qu’il ne répondra pas aux attentes de changement exprimées par les Français.es. En privilégiant des proches fidèles de la Première ministre, le gouvernement semble s’engager sur une voie de continuité avec la politique actuelle de Macron, suscitant ainsi des doutes quant à sa volonté de réellement renouveler son approche et d’ouvrir le dialogue avec des perspectives différentes.

 

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