L’entretien négligé des immeubles peut compromettre la sécurité des résidents et des biens. Selon la loi, en tant que maire, vous avez le pouvoir d’intervenir pour exiger des propriétaires qu’ils prennent des mesures adéquates pour résoudre les situations dangereuses. Cela concerne le processus de déclaration de péril, la vérification de la sécurité des hôtels meublés, ainsi que la sécurité des immeubles collectifs principalement destinés à l’habitation.
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La police des immeubles menaçant ruine
La responsabilité de surveiller les immeubles présentant des risques structurels repose notamment sur l’article L. 2213-24 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), qui confère des pouvoirs de police spéciale. La procédure de déclaration de péril est basée sur la nécessité de préserver la sécurité publique et de minimiser les dangers pour les personnes, le grand public et les occupants. Cela prend en compte les problèmes de stabilité des éléments de construction, y compris les éléments internes aux bâtiments.
Dans le cadre de ce pouvoir de police spécial, qui est encadré par les articles L. 511-1 à L. 511-6 du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH), deux types de procédures sont distingués : le péril ordinaire et le péril imminent.
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Procédure ordinaire : Communication avec le propriétaire et dialogue contradictoire (Article L. 511-2 du CCH)
Lorsqu’il est repéré que des problèmes sérieux affectent un bâtiment, pouvant justifier l’engagement de la procédure de déclaration de péril, le maire communique directement avec le propriétaire par le biais d’une lettre qui sera remise en personne contre signature. Cette lettre invite le propriétaire à partager ses points de vue dans un délai précisé par le maire. Ce laps de temps ne peut être raccourci à moins d’un mois.
Publication de l’arrêté de péril ordinaire
À la fin de cette période, si les défauts constatés persistent, le maire émet un arrêté de péril. Ce dernier exige du propriétaire de l’immeuble, dans un délai d’au moins un mois, d’entreprendre les travaux nécessaires pour réparer les dommages ou démolir le bâtiment. En outre, si cela s’avère nécessaire, le maire peut également stipuler que des mesures de sécurité doivent être prises pour protéger les bâtiments adjacents.
Si la solidité de tout ou partie de la construction ne permet pas de garantir la sécurité des occupants, des voisins ou des passants, le maire peut également assortir l’arrêté de péril d’une interdiction temporaire ou permanente d’occuper les lieux.
Inaction face aux travaux prescrits
Si les directives énoncées dans l’arrêté ne sont pas suivies dans le délai convenu, le maire met en demeure le propriétaire de les accomplir dans un délai d’au moins un mois.
En cas de négligence dans le respect de ce délai, le maire prend l’initiative de faire exécuter les travaux aux frais du propriétaire.
De plus, le maire peut solliciter une ordonnance du juge des référés pour autoriser la démolition prescrite si celle-ci n’a pas été entreprise.
Certification de l’achèvement des travaux
L’achèvement des travaux ordonnés par l’arrêté est attesté par un professionnel du secteur désigné par le maire. Ce spécialiste rédige un rapport destiné au maire, qui, se basant sur ce compte-rendu, émet un arrêté officialisant la réalisation des travaux et décidant la levée de l’arrêté de péril, ainsi que, le cas échéant, la levée de l’interdiction d’occuper les lieux.
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Procédure d’urgence : Communication avec le propriétaire et désignation de l’expert (Article L. 511-3)
Lorsqu’une situation de danger imminent se présente, après avoir alerté le propriétaire, le maire sollicite l’intervention du juge des référés du tribunal administratif compétent. La requête vise à obtenir la nomination d’un expert. Ce professionnel, nommé dans les plus brefs délais, a pour mission d’inspecter les bâtiments et, dans les 24 heures suivant sa désignation, de dresser un constat de l’état des constructions adjacentes. En cas de confirmation du péril imminent, l’expert formule des recommandations visant à éliminer cette menace.
Publication de l’arrêté de péril imminent
Lorsque le rapport de l’expert conclut à une menace grave et immédiate, le maire prend un arrêté de péril. Ce dernier ordonne au propriétaire, dans un délai fixé par le maire, d’entreprendre des mesures temporaires pour assurer la sécurité, notamment l’évacuation des occupants du bâtiment.
Dans certains cas, le maire peut imposer la démolition partielle de l’immeuble pour éliminer des éléments dangereux, comme une partie de mur susceptible de s’effondrer.
Négligence dans l’exécution des mesures
Si les travaux requis ne sont pas accomplis dans le délai déterminé, le maire prend l’initiative de faire exécuter ces travaux aux frais du propriétaire.
Validation de l’achèvement des travaux et éventuelle poursuite de la procédure
Si les mesures temporaires ont à la fois écarté la menace imminente et durablement supprimé le danger, le maire, basé sur le rapport d’un expert qualifié, enregistre leur mise en œuvre ainsi que la date de leur achèvement.
Si ces mesures n’ont pas éliminé durablement le danger, le maire poursuit la procédure conformément aux dispositions prévues pour le péril ordinaire.
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Contrôle de la sécurité des hôtels meublés (Articles L. 123-1 à L. 123-4 du CCH)
Les hôtels meublés sont des établissements destinés à l’hébergement. Dans cette optique, le maire a la responsabilité de veiller à leur surveillance et à leur sécurité, tout comme il le ferait pour d’autres lieux accueillant le public.
En vertu de l’article L. 123-3 du CCH spécifiquement dédié aux hôtels meublés, le maire dispose du pouvoir d’émettre des instructions par le biais d’un arrêté, adressé à la fois à l’exploitant et au propriétaire d’un hôtel. Ces directives sont établies suite à une visite et à l’avis de la commission de sécurité. L’objectif est d’exiger la mise en place de mesures et de travaux nécessaires pour mettre un terme à toute situation d’insécurité constatée. Si la nécessité se fait sentir, le maire peut également décider d’interdire l’occupation des locaux. De plus, en cas de non-respect de ces mesures, le maire peut agir lui-même, aux frais de l’exploitant.
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Sécurité des immeubles collectifs à usage principal d’habitation Procédure ordinaire (Articles L. 129-1, L. 129-2 et L. 129-4 du CCH)
Lorsque les propriétaires d’un immeuble collectif à usage d’habitation négligent les équipements communs, causant des problèmes de fonctionnement ou d’entretien qui posent des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou compromettent gravement leurs conditions de vie, le maire a la possibilité de prendre des mesures. Par le biais d’un arrêté, il peut exiger que les équipements soient réparés ou remplacés, et il détermine le délai pour ces travaux.
Si les mesures imposées ne sont pas mises en œuvre dans le délai défini, le maire adresse une mise en demeure au propriétaire ou au syndicat de copropriété, en précisant un nouveau délai. En cas de non-respect de ce délai, le maire, par une décision motivée, peut prendre l’initiative de faire exécuter les travaux d’office aux frais du propriétaire.
Procédure d’urgence (Article L. 129-3 du CCH)
Dans des situations urgentes, le maire a la faculté de demander au juge administratif de désigner un expert chargé d’évaluer l’état des équipements communs dans les 24 heures.
Si le rapport de l’expert conclut à une situation d’urgence ou à une menace grave et imminente, le maire peut imposer des mesures temporaires pour assurer la sécurité des occupants, et si nécessaire, ordonner l’évacuation de l’immeuble. Si ces mesures provisoires ne sont pas exécutées dans le délai fixé par l’arrêté, le maire peut les mettre en œuvre d’office et faire supporter les frais aux propriétaires concernés.
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Gestion de l’insalubrité (Articles L. 1331-22 à L. 1331-30 du code de la santé publique)
La lutte contre l’insalubrité des bâtiments vise à protéger les résidents des risques pour leur santé liés à l’état dégradé de leurs logements. Cette protection est assurée par la réalisation de travaux nécessaires.
La lutte contre les logements insalubres relève de la compétence de l’État. Cette responsabilité est exercée au moyen d’un arrêté préfectoral déclarant l’insalubrité et ordonnant les actions requises pour y remédier.
L’insalubrité peut être considérée comme remédiable lorsqu’une rénovation est demandée au propriétaire.
L’insalubrité est jugée irrémédiable lorsque la situation ne peut pas être résolue techniquement ou lorsque les coûts des travaux excèdent ceux d’une reconstruction. Dans le cas de travaux d’interdiction d’accès, le préfet peut déclarer l’immeuble irrémédiablement insalubre. Il peut prendre toutes les mesures nécessaires pour bloquer l’accès et l’usage de l’immeuble au fur et à mesure de son évacuation. Le maire, agissant au nom de l’État, peut également prendre ces mêmes mesures à tout moment. Ces actions peuvent être exécutées d’office.
En plus de l’interdiction d’accès aux locaux irrémédiablement insalubres, le maire assiste le préfet dans la mise en place de ces mesures à deux niveaux. D’une part, il est chargé de traiter les dossiers d’insalubrité avant que l’arrêté ne soit pris, dans le cas où sa commune possède un service communal d’hygiène et de santé mentionné à l’article L. 1422-1 du code de la santé publique. D’autre part, si le propriétaire ne se conforme pas aux travaux prescrits par l’arrêté d’insalubrité remédiable, le maire, au nom de l’État ou, à défaut, le préfet, est habilité à les faire réaliser d’office. Dans ce cas, si le maire organise ces travaux d’office, la commune avance les frais. Les sommes impayées par la commune sont alors prises en charge par l’État.
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Soutien au Relogement (Articles L. 521-1 et suivants du CCH)
Conformément à l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation, les propriétaires et les gestionnaires de locaux d’hébergement ont la responsabilité d’assurer le relogement ou l’hébergement des résidents et de contribuer aux coûts correspondants.
Ainsi, si l’état du bâtiment ne permet pas de garantir la sécurité des occupants, le maire peut, si nécessaire, compléter son arrêté de péril ou d’arrêté de sécurité lié à un hôtel avec une interdiction temporaire ou permanente d’occuper ou d’utiliser les lieux. Dans ce cas, la responsabilité de reloger les résidents incombe au propriétaire.
En cas de négligence de la part du propriétaire, le maire doit prendre toutes les mesures nécessaires pour offrir un hébergement ou un relogement aux résidents. Les frais résultants de ces actions sont à la charge des gestionnaires ou des propriétaires.
Cependant, les municipalités peuvent être confrontées à des propriétaires non identifiés ou insolvables, ce qui peut rendre complexe le recouvrement des coûts engagés.
Tout d’abord, si les propriétaires sont inconnus, la commune peut acheter les biens concernés pour récupérer les dépenses engagées, en suivant la procédure décrite à l’article L. 1123-3 du code général de la propriété des personnes publiques.
En ce qui concerne les propriétaires insolvable, il est nécessaire de mettre en œuvre les démarches de recouvrement de dette (article L. 1617-5 du CGCT) et de recourir à l’exécution forcée.
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Pouvoirs de Police Générale (Articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du CGCT)
L’article L. 2212-2 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) établit que la police municipale a pour but d’assurer « le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques » (voir la section intitulée « Les pouvoirs de police du maire »). Elle inclut notamment « le devoir de prévenir, par des mesures appropriées, et de mettre un terme, en fournissant l’aide nécessaire, aux accidents, aux désastres ainsi qu’aux pollutions de toutes sortes, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les chutes de terre ou de rochers, les avalanches ou autres événements naturels, les épidémies ou maladies contagieuses, les épidémies animales, et de prendre rapidement toutes les mesures d’aide et de secours nécessaires ».
L’article L. 2212-4 du CGCT stipule que « en cas de danger sérieux ou imminent, comme les catastrophes naturelles énumérées au 5° de l’article L. 2212-2, le maire ordonne la mise en place des mesures de sécurité nécessaires compte tenu des circonstances ».
Ainsi, lorsque l’intégrité des bâtiments est menacée par des incidents imprévus, le maire agit pour garantir la sécurité des résidents en utilisant les compétences générales qui lui sont conférées.
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Articulation des Pouvoirs de Police en Cas de Péril Immobilier
Les compétences de police générale attribuées au maire se distinguent des pouvoirs qui lui sont conférés dans le cadre des procédures de péril énoncées dans les articles L. 511-1 à L. 511-4 du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH).
Lorsqu’une situation de péril se manifeste, le maire doit déterminer quelle procédure est la plus appropriée pour garantir la légalité de son action. À cet effet, il peut s’appuyer sur la jurisprudence du Conseil d’État du 10 octobre 2005, n° 259205, Commune de Badinières, qui a établi des principes fondamentaux en la matière :
Les compétences de police générale reconnues au maire par les articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) sont à exercer dans les situations où le danger pour un bâtiment provient d’une cause extérieure. Cependant, en cas d’urgence extrême créant un péril particulièrement grave et imminent, le maire peut légitimement utiliser ses pouvoirs de police générale, quelle que soit la source du danger. Cela inclut la possibilité de prescrire des mesures de sécurité nécessaires et appropriées, comme une démolition urgente justifiée par la gravité de la situation.
Les pouvoirs de police spéciale attribués au maire dans le contexte des procédures de péril ou de péril imminent régies par les articles L. 511-1 à L. 511-4 du CCH doivent être déployés lorsque le danger causé par un bâtiment provient principalement de ses caractéristiques intrinsèques.
Avant la jurisprudence établie par l’affaire Commune de Badinières, le Conseil d’État avait déjà reconnu la capacité du maire de prescrire des mesures d’évacuation et d’interdiction d’accès à un bâtiment dangereux, en s’appuyant sur ses pouvoirs de police générale, en cas de menace grave et imminente (CE, 2 mai 1990, n° 89299, Préfet de police c/ Khadi).