Mélanie Thomin, députée du Finistère, s’est positionnée fermement en faveur des jeunes agriculteurs en interpellant le gouvernement par une question écrite au sujet de la déchéance de la Dotation Jeune Agriculteur (DJA). Une question cruciale qui souligne les enjeux majeurs pour l’avenir de l’agriculture française et appelle à des mesures concrètes pour soutenir les nouvelles générations d’agriculteurs. Vous trouverez ci-dessous la question écrite de Mélanie Thomin et la réponse qui lui a été apportée par le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Question publiée au JO le : 09/05/2023
Mme Mélanie Thomin appelle l’attention de M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la déchéance de la dotation jeune agriculteur (DJA). L’avenir de la force agricole française dépend étroitement de la capacité des jeunes agriculteurs à s’installer, acquérir du foncier et développer leur activité. La transmission est un enjeu majeur de souveraineté alimentaire. La dotation jeune agriculteur participe à faciliter le démarrage des nouvelles entreprises agricoles. Ce dispositif prévoit des cas de déchéance totale ou partielle des aides à l’installation au terme du plan de développement économique (PDE) en cas de non-respect des engagements prévus à l’article D. 343-5 du code rural et de la pêche maritime. Initialement l’atteinte d’un seuil de revenu (revenu disponible agricole et revenu professionnel global) constituait un engagement et un motif de déchéance des aides, pénalisant des jeunes exploitations qui n’avait pas généré suffisamment de revenus. Cette sanction apparaît comme une deuxième sanction excessive après l’échec économique de l’amorçage. Depuis le décret n° 2020-131 du 17 février 2020 relatif aux aides à l’installation en agriculture (abrogeant notamment l’article D. 343-6 du CRPM), l’atteinte d’un seuil de revenu n’est plus un motif de déchéance des aides. Pourtant, dans le Finistère et ailleurs, des décisions de déchéance partielle continuent d’être prises sur le fondement des engagements de revenu pris antérieurement à l’entrée en vigueur du décret susmentionné, générant incompréhensions et sentiment d’injustice. C’est pourquoi elle lui demande quelles mesures le Gouvernement envisage, en lien avec les préfectures, afin de soutenir l’installation des jeunes agriculteurs et rendre pleinement effective l’abrogation de la déchéance liée au revenu dans le cadre de la DJA pour les agriculteurs ayant intégré le dispositif antérieurement au 20 février 2020.
Réponse publiée au JO le : 05/09/2023
L’accompagnement et le soutien à l’installation de nouveaux agriculteurs constituent une priorité pour le Gouvernement, afin de garantir le renouvellement des générations et le maintien d’une agriculture compétitive, diversifiée et durable. À cet égard, les aides à l’installation constituent un levier essentiel pour atteindre ces objectifs. Mise en œuvre dans le cadre du second pilier de la politique agricole commune (PAC) afin d‘accompagner le démarrage de l’activité des jeunes agriculteurs, la dotation jeunes agriculteurs (DJA) est une aide en trésorerie cofinancée par le fonds européen agricole pour le développement rural et l’État. La bonne réalisation des objectifs poursuivis par la DJA implique le respect par ses bénéficiaires d’un certain nombre d’engagements définis au niveau du code rural de la pêche maritime (CRPM). La réalisation des contrôles de ces engagements est une obligation européenne (cf. règlement (UE) n° 1305/2013 relatif au soutien au développement rural par le fonds européen pour la programmation 2014-2022, article 19, paragraphe 5) et nationale (article D. 343-18 du CRPM), à laquelle il ne peut être dérogée. En cas de non-respect d’un ou plusieurs engagements, le préfet est tenu de prononcer une déchéance totale, ou partielle, des aides octroyées correspondant aux engagements non respectés. À défaut, la France s’expose à un risque de sanctions financières de la part de la Commission européenne. Lors de la programmation de la PAC 2007-2013, conformément aux dispositions des articles D. 343-5 (4°) et D. 343-7 du CRPM, les candidats aux aides à l’installation ayant déposé leur demande de DJA à partir du 19 décembre 2008 se sont notamment engagés à mettre en œuvre le plan de développement de l’exploitation (PDE), lequel devait respecter les exigences de l’arrêté du 13 janvier 2009 relatif au contenu du PDE, à savoir : – atteindre un revenu disponible agricole (RDA) égal ou supérieur à un salaire minimum de croissance (SMIC), net de prélèvements sociaux, au terme du plan, (art. 2, 8° dudit arrêté) ; – ne pas dépasser un revenu professionnel global (RPG) annuel apprécié sur les cinq années du plan, au-delà de trois fois le SMIC, net de prélèvements sociaux (art. 5 dudit arrêté). Conformément aux dispositions de l’article D. 343-18-2 du CRPM, en cas de non atteinte du RDA minimum, l’agriculteur peut être sanctionné d’une déchéance de 30 % de la DJA pour non-respect du PDE, sauf à pouvoir justifier d’un cas de force majeure, de crise conjoncturelle ou de circonstances exceptionnelles. En référence à ce même article, en cas de dépassement du seuil des trois SMIC pour le RPG, l’agriculteur est sanctionné d’une déchéance de 100 % de la DJA, sauf s’il relève d’un cas de force majeure ou de crises conjoncturelles ou de circonstances exceptionnelles ayant entraîné l’une des deux situations suivantes : – restructuration de l’endettement par le report d’une ou plusieurs annuités (année blanche) ou rééchelonnement des prêts ; – report d’un investissement pour des raisons indépendantes de la volonté de l’agriculteur. Dans ces deux cas, il est alors possible d’intégrer au calcul du RPG moyen le montant des annuités initialement prévues. Le RPG moyen ainsi calculé doit néanmoins ne pas dépasser le seuil de trois SMIC. Un peu plus d’un tiers des déchéances prononcées au titre des règles édictées dans le cadre de cette programmation sont imputables au dépassement du seuil de revenu. Lors de la programmation de la PAC 2014-2022, le décret n° 2020-131 du 17 février 2020 relatif aux aides à l’installation des jeunes agriculteurs a supprimé le contrôle des conditions de revenu au terme du plan d’entreprise (PE). La vérification au terme du PE de la viabilité de l’exploitation se fait principalement sur la base de l’attestation d’assujettissement à la mutualité sociale agricole (MSA) qui peut être complétée, en tant que de besoin, par d’autres justificatifs tels que la déclaration PAC, le relevé parcellaire de la MSA, la fiche de synthèse comptable. Ainsi, les niveaux de revenu ne sont plus susceptibles de conduire à une déchéance de la DJA pour les demandes déposées à compter du 1er janvier 2015. Toutefois, conformément aux articles D. 343-4 et D. 343-7 du CRPM, la démonstration de la viabilité du projet d’installation demeure une composante du plan d’entreprise vérifiée et examinée au moment de l’instruction de la demande d’aide. Dans le cadre de la nouvelle programmation de la PAC 2023-2027, les conseils régionaux deviennent responsables de la définition des conditions d’éligibilité aux aides à l’installation qu’ils estiment pertinentes pour leur région et, en conséquence, des conditions de déchéance de ces aides. Cette nouvelle organisation de la gestion des aides à l’installation a vocation à améliorer l’adéquation des projets d’installation aux projets de territoires. Enfin, s’agissant des mesures envisagées par le Gouvernement, il convient de rappeler que, dans le prolongement des annonces du Président de la République, une phase de concertation, organisée à l’échelle nationale et régionale, vient de s’achever avec l’objectif de mettre en œuvre un pacte et une loi d’orientation et d’avenir agricoles portant l’ambition de répondre aux défis majeurs que sont le renouvellement des actifs en agriculture, la souveraineté alimentaire et les transitions climatique et agro-écologique d’ici 2040. Un certain nombre de propositions issues des rapports de synthèse de ladite concertation sur l’orientation et la formation, l’installation et la transmission ou encore l’innovation et l’adaptation au changement climatique, doivent faire l’objet d’une traduction législative ou être intégrés dans le pacte d’orientation et d’avenir agricoles au cours du second semestre 2023.