2023 : Une année noire pour les finances publiques
Selon la Cour des comptes, 2023 peut être qualifiée de « très mauvaise année » pour les finances publiques françaises. Le déficit public a grimpé à 5,5 % du PIB, dépassant de 0,6 point les prévisions initiales du gouvernement. Cette dégradation budgétaire est attribuée à une conjonction de facteurs défavorables : les séquelles de la crise sanitaire, l’inflation galopante et une incertitude politique post-législatives. La France n’a pas su profiter pleinement de la normalisation économique post-COVID, ni de la baisse progressive des prix après le pic inflationniste de début d’année.
Des prévisions trop optimistes ?
Le rapport ne mâche pas ses mots en décrivant les projections budgétaires du gouvernement pour les prochaines années comme « trop optimistes » et « peu réalistes ». En effet, le programme de stabilité présenté prévoit une réduction progressive du déficit public pour atteindre 2,9 % du PIB d’ici 2027. Cependant, la Cour des comptes souligne que ces objectifs reposent sur des hypothèses de croissance jugées irréalistes et sur des économies en dépenses jamais vues auparavant. De plus, les hausses importantes des prélèvements obligatoires nécessaires pour atteindre ces objectifs ne sont pas clairement détaillées. Selon la Cour, le manque de documentation et de précisions rend ces prévisions particulièrement fragiles et difficilement atteignables.
L’oubli des coûts liés à la transition énergétique
Un autre point de critique majeur concerne l’absence de prise en compte des coûts liés au réchauffement climatique et à la transition énergétique dans les prévisions budgétaires. La Cour des comptes estime que ces coûts pourraient atteindre plus de 60 milliards d’euros par an d’ici 2030, une somme colossale qui pourrait peser lourdement sur les finances publiques. Elle appelle donc à une intégration réelle de ces enjeux dans la programmation des finances publiques. Selon le rapport, la transition énergétique, indispensable pour respecter les engagements climatiques de la France, nécessitera des investissements massifs. Ignorer ces coûts dans les prévisions budgétaires pourrait conduire à une sous-estimation des besoins financiers futurs et compromettre la viabilité des finances publiques.
Dépenses des collectivités locales sous la loupe
Les collectivités locales ne sont pas épargnées par les critiques de la Cour des comptes. En 2023, leurs dépenses de fonctionnement ont largement dépassé les objectifs fixés, augmentant de 2 milliards d’euros de plus que prévu. Les dépenses d’investissement ont également excédé les prévisions budgétaires de 2 milliards d’euros. La Cour appelle à une meilleure maîtrise de ces dépenses pour éviter de compromettre davantage la situation financière du pays. Elle pointe du doigt l’absence de mécanismes contraignants pour limiter les dépenses de fonctionnement des collectivités, ainsi que l’impact des hausses des coûts énergétiques et alimentaires sur leurs budgets. La Cour insiste sur la nécessité d’un contrôle plus strict et de réformes structurelles pour contenir ces dépenses.
Le gouvernement se défend
Face aux critiques de la Cour des comptes, le ministère de l’Économie et des Finances a tenté de minimiser les conclusions alarmantes du rapport. Insistant sur les efforts pour protéger les ménages et les entreprises durant les crises récentes, Bruno Le Maire s’est défendu en affirmant que sans ces mesures, « la France n’aurait pas été parmi les premiers pays européens à retrouver un niveau de PIB antérieur à la crise du Covid ». Le ministère a également vanté la stabilité de la notation française et l’écart des taux d’intérêt avec l’Allemagne comme preuves de confiance des marchés financiers. Néanmoins, ces justifications semblent bien faibles face aux projections irréalistes et au manque de transparence soulignés par la Cour des comptes.