Depuis le 4 décembre 2024, la politique nationale s’est enrayée. L’adoption d’une motion de censure à l’Assemblée nationale a provoqué la chute du Gouvernement et, dans son sillage, la suspension du projet de loi de finances pour 2025. À défaut de budget, une loi spéciale de finances a été mise en place pour assurer le minimum, mais elle ne répond qu’à une partie des besoins des territoires.
Les collectivités locales ne recevront que les dotations « essentielles », reconduites au niveau de 2024 : la Dotation Globale de Fonctionnement et le Fonds de Compensation pour la TVA continueront d’être versés. Une bouffée d’air pour garantir le fonctionnement des services publics de base, mais guère plus. Car derrière cette façade de stabilité, les subventions pour de nouveaux projets sont gelées : pas de Dotation d’Équipement des Territoires Ruraux , pas de Dotation de Soutien à l’Investissement Local, pas de Fonds vert. Les communes et intercommunalités, déjà fragilisées, voient leurs ambitions freinées net.
UN BUDGET 2025 EN SUSPENS : DES INCERTITUDES POUR LES COLLECTIVITÉS
Deux mois après la présentation initiale du projet de loi de finances pour 2025, les collectivités locales font face à un brouillard encore plus épais. La reconduction des « prélèvements sur recettes », comme la DGF ou le FCTVA, est actée par la loi spéciale, conformément à l’avis du Conseil d’État du 9 décembre 2024. Cependant, les dotations d’investissement, essentielles pour initier de nouveaux projets, restent gelées. Les subventions attribuées auparavant seront versées, mais aucun financement additionnel ne sera alloué tant qu’une loi de finances complète ne sera adoptée.
Des questions d’agenda inquiètent aussi : les dotations pour 2025 pourront-elles être notifiées avant le 31 mars, comme le veut la pratique ? Le risque de retard dans la promulgation de la loi de finances met à mal les calendriers habituels, laissant les décideurs locaux dans l’incertitude.
DES CONSÉQUENCES LOURDES POUR LES TERRITOIRES RURAUX ET ULTRAMARINS
Dans les territoires ruraux, 2 168 communes espéraient bénéficier du programme France Ruralités Revitalisation. Une réforme fiscale essentielle pour leur développement, désormais reportée. Le renforcement prévu avec « FRR+ » ne verra pas non plus le jour. Pour ces communes souvent délaissées, l’équation budgétaire devient impossible, alors que les besoins de modernisation s’intensifient.
La situation est tout aussi critique pour les territoires ultramarins. En Martinique et en Guadeloupe, la baisse de TVA, censée donner un souffle à l’économie locale, restera lettre morte. En Nouvelle-Calédonie, le prêt d’un milliard d’euros via l’Agence Française de Développement est bloqué, laissant le territoire face à ses difficultés budgétaires, sans perspectives immédiates.
LA POSITION DES SÉNATEURS SOCIALISTES : UNE VISION POUR UNE AUTRE POLITIQUE ÉCONOMIQUE
Dans ce contexte tendu, les sénatrices et sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ont pris une position claire en faveur de la loi spéciale, tout en dénonçant les dérives fiscales des dernières années. Les baisses d’impôts massives mises en œuvre depuis 2017 ont fragilisé les finances publiques et alourdi la dette. Cette situation, combinée à la crise institutionnelle actuelle, rend urgente une refonte de la politique économique et fiscale.
Les élu.es du groupe appellent à une correction immédiate de cette trajectoire, prônant des recettes fiscales équilibrées pour sauvegarder les services publics et relancer un modèle social en déclin. Leur engagement se traduit par un appel à un véritable changement de méthode, visant à renouer avec un pouvoir exécutif davantage connecté aux attentes des territoires.
En votant ce texte, ils ont voulu assurer une continuité minimale des finances publiques tout en avertissant : cette loi n’est qu’un palliatif. Les investissements, la transition écologique et le soutien aux collectivités locales doivent redevenir des priorités dans les prochaines décisions budgétaires.
SOUTENIR LES PROJETS ET RÉDUIRE LES FRACTURES TERRITORIALES
Face à cette situation inédite, les élus locaux sont contraints de composer avec un budget amputé, où seules les dépenses engagées pourront être honorées. Transition écologique, aménagement urbain, infrastructures : autant de priorités mises entre parenthèses, suspendues à l’adoption d’un budget.
Mais pour ces élus, l’heure n’est pas à la résignation. Cette impasse budgétaire exige une mobilisation sans faille pour porter la voix des territoires dans les prochains débats nationaux. L’adoption rapide d’un budget complet devient un impératif. Il en va de la relance des investissements, du soutien aux communes rurales et de la réduction des fractures territoriales.
Plus que jamais, les élus devront rappeler que les attentes des collectivités locales ne peuvent pas attendre. La paralysie actuelle, si elle perdure, risque d’accentuer les disparités et de laisser sur le bord de la route les projets porteurs d’avenir.
Pour consulter l’intégralité des précisions sur la loi spéciale de finances et l’avis du Conseil d’État, vous pouvez accéder aux documents officiels via les liens ci-dessous :
Sources : Association des Maires de France & Intercommunalités de France