PRIME RÉGALIENNE : UNE RECONNAISSANCE ATTENDUE, UN MONTANT QUI INTERROGE

En clôture du 107e Congrès des maires, le Premier ministre a annoncé l’instauration prochaine d’une « prime régalienne » destinée à reconnaître le travail que les maires accomplissent au nom de l’État. Une annonce symboliquement forte, mais dont le montant, 500 euros par an, laisse les élus partagés entre satisfaction de principe et déception sur le fond.

Dès son arrivée à Matignon, le Premier ministre avait affirmé vouloir une reconnaissance plus juste de l’engagement des maires lorsqu’ils agissent comme agents de l’État. Le discours prononcé la semaine dernière en est la traduction politique. Pour la première fois depuis plus de deux siècles, l’État accepterait de compenser financièrement une partie des missions régaliennes confiées aux maires.

Mais la portée concrète de cette rémunération fait débat. Avec 500 euros annuels, soit environ 41 euros par mois, la prime envisagée paraît très éloignée des évaluations formulées par le Sénat. Dans un rapport de référence, trois sénateurs, dont le socialiste Éric Kerrouche, estimaient que les missions exercées au nom de l’État représentaient environ 10 % du temps consacré par les maires à leur mandat. Ils proposaient donc une compensation équivalente à 10 % du plafond indemnitaire, ce qui aurait représenté des montants allant de 104 à près de 600 euros mensuels selon la taille de la commune. L’écart avec l’annonce gouvernementale est donc considérable.

L’AMF, tout en saluant le principe, note que le montant annoncé a suscité de nombreuses réactions d’élus. Plusieurs présidents d’associations départementales ont fait remonter un sentiment d’inadéquation entre cette somme et la réalité des tâches exercées au quotidien par les maires lorsqu’ils agissent au nom de l’État : officier d’état civil, police administrative, mariages, application des décisions préfectorales ou judiciaires. Une autre question reste ouverte, celle du rôle des adjoints, qui exercent eux aussi certaines de ces missions lorsqu’une délégation leur est confiée.

Pour l’AMF, la reconnaissance est légitime, mais elle ne peut être isolée du débat plus large sur les moyens accordés aux communes. L’association rappelle que les alertes des élus concernent d’abord les capacités financières des collectivités. Elle appelle à mettre fin aux prélèvements supplémentaires envisagés dans le projet de loi de finances, considérant que c’est sur cette question essentielle que les communes attendent des réponses. Sans moyens suffisants, les services de proximité, la transition écologique ou encore l’investissement local ne peuvent être assurés.

Reste à savoir quand et comment cette prime pourrait être inscrite dans un texte. Aucune disposition n’est aujourd’hui présente dans le projet de loi de finances en discussion. Le gouvernement déposera-t-il un amendement en dernière lecture ou souhaite-t-il ouvrir une concertation plus large avant une mise en œuvre en 2027 ? Le Premier ministre n’a pas apporté de précision sur ce point.

La proposition de loi sur le statut de l’élu, elle, prévoit qu’un rapport soit remis avant le 30 juin 2026 sur les coûts liés aux missions exercées par les maires au nom de l’État. La version initiale évoquait l’étude d’un prélèvement sur les recettes de l’État au bénéfice des communes pour compenser ces missions, mais cette mention a disparu au fil de la navette parlementaire.

Entre symbole et réalités budgétaires, la question reste entière. La prime régalienne peut constituer une première avancée, mais elle ne saurait remplacer un débat de fond sur les moyens financiers et juridiques des communes, qui conditionnent la qualité des services publics locaux et la capacité du pays à investir dans l’avenir.

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