Le gouvernement a adressé, le 25 novembre, une circulaire aux préfets sur l’organisation de l’hébergement et du relogement des femmes victimes de violences. Diffusé lors de la Journée internationale du 25 novembre, le texte vise à homogénéiser des pratiques qui demeurent très contrastées selon les territoires. Pour les collectivités, l’enjeu est moins une réforme du dispositif qu’une clarification des responsabilités des services de l’État et de la manière dont ils devront désormais coordonner ce parcours.
La circulaire réaffirme d’abord un principe essentiel : l’accès à l’hébergement spécialisé ne doit être conditionné à aucun document. Aucune plainte, aucun certificat médical ne peut être exigé. L’évaluation des professionnels suffit. Les femmes majeures victimes de violences conjugales ou intrafamiliales et leurs enfants sont prioritaires, et des solutions non mixtes doivent être prévues pour les hommes victimes.
Le texte précise ensuite les modalités d’admission. La mise à l’abri doit pouvoir être immédiate, y compris en dehors des horaires habituels. Les admissions directes sont autorisées en cas de danger, ce qui clarifie une pratique déjà appliquée dans certains départements. L’objectif affiché, présenté sous la formule « protéger, reloger, reconstruire », s’inscrit toutefois dans une continuité plus que dans une refonte du dispositif.
La circulaire renforce également le rôle des Services intégrés d’accueil et d’orientation. Ils devront suivre en temps réel les places disponibles, orienter les demandes, centraliser les informations et coordonner les acteurs : forces de l’ordre, associations spécialisées, travailleurs sociaux, structures de santé et collectivités. La coopération entre départements est encouragée lorsqu’un éloignement géographique est nécessaire pour garantir la sécurité d’une victime.
Le volet consacré au relogement durable est détaillé. Les victimes doivent pouvoir accéder en priorité au parc social sur présentation d’un justificatif, par exemple une décision du juge aux affaires familiales, un récépissé de dépôt de plainte ou une attestation professionnelle. Les préfets sont invités à mobiliser les contingents réservés et à travailler plus étroitement avec les bailleurs. Les outils déjà existants, comme les baux glissants, les logements passerelles ou l’accompagnement renforcé, sont rappelés. Les conférences intercommunales du logement devront intégrer ces situations dans leurs travaux.
Les annexes de la circulaire proposent des protocoles départementaux à adapter. Ils associent services de l’État, collectivités, associations et bailleurs. Ces documents doivent fixer les engagements de chacun, les modalités d’admission, la gestion des places d’urgence, l’articulation avec le logement durable et les procédures de suivi. Ce formalisme, déjà utilisé dans certains territoires, devra être généralisé.
La circulaire évoque enfin l’identification de places d’hébergement mobilisables rapidement, la formation des professionnels et des dispositifs spécifiques pour les victimes de prostitution, de proxénétisme ou de traite.
Ce texte arrive dans un contexte où les violences restent très élevées. Plus de 240 000 femmes déclarent chaque année des violences au sein du couple. Le nombre de féminicides est de 118 cas recensés en 2024. Plusieurs associations dénoncent une saturation persistante des dispositifs malgré l’augmentation annoncée des places et des budgets. Un projet de loi-cadre est en préparation pour combler certaines failles, notamment sur les dépôts de plainte, la prise en compte du contrôle coercitif ou les délais judiciaires. Beaucoup soulignent cependant que la question des moyens reste centrale.
Pour les élus, l’enjeu ne tient pas tant au contenu de la circulaire qu’à la manière dont l’État la mettra en œuvre. Le texte fixe une doctrine nationale. Sa portée dépendra entièrement de la capacité des services départementaux à organiser les admissions, coordonner les acteurs, travailler avec les bailleurs et garantir des solutions accessibles. Les collectivités resteront des partenaires indispensables, mais c’est désormais au pilotage de l’État de démontrer qu’un dispositif clair et opérationnel peut fonctionner partout.
La circulaire est disponible en version intégrale ci-dessous pour consultation.


