ANDRÉ LAIGNEL APPELLE À UNE DÉCENTRALISATION URGENTE FACE À UN ÉTAT « DÉCONNECTÉ »

Dans une période où les élus locaux sont confrontés à des défis sans précédent, André Laignel, maire d’Issoudun et premier vice-président délégué de l’Association des Maires de France, pousse un cri d’alarme. Réduction des budgets, recentralisation des pouvoirs, manque de soutien aux projets locaux : pour André Laignel, ces contraintes sapent l’efficacité de l’action publique et minent la démocratie locale. En réponse, il appelle à une décentralisation plus audacieuse, qui redonnerait aux communes les moyens d’agir.

La commune, dernier rempart pour les citoyens

Dans une interview accordée à Maires de France le 31 octobre, André Laignel a décrit les défis quotidiens auxquels font face les collectivités locales. « Les maires incarnent la proximité face à des administrations déshumanisées », a-t-il affirmé, soulignant que les collectivités locales sont souvent les premières à intervenir pour atténuer les crises économiques, sociales et écologiques. Face à des démarches sans réponse au niveau national, les citoyens se tournent vers leurs élus municipaux, parfois comme ultime recours.

Pourtant, malgré leur rôle essentiel, les maires voient souvent leur expertise ignorée par une administration centrale déconnectée des réalités du terrain. Face aux mesures annoncées, André Laignel appelle les élus locaux, de toutes sensibilités, à unir leurs efforts pour préserver la vitalité des territoires et assurer la résilience de la République dans les périodes de crise.

Un budget 2025 qui menace les investissements locaux

À quelques jours du 106e congrès de l’AMF, l’élu a exprimé son indignation en début de semaine sur Franceinfo, qualifiant le projet de budget 2025 de « purge sans précédent » pour les collectivités. Bien que le gouvernement estime l’effort budgétaire à 5 milliards d’euros, André Laignel indique, après analyse de la loi de finances, que les coupes et nouvelles charges représenteront plus de 11 milliards d’euros pour les communes, mettant en péril de nombreuses initiatives locales.

André Laignel alerte sur les conséquences dramatiques de cette « purge », qu’il estime capable de provoquer une « panne générale des investissements » dans les territoires. En restreignant la capacité des communes et départements à financer des projets, le budget menace directement des secteurs comme le bâtiment et les travaux publics, qui dépendent en grande partie des investissements locaux. La situation est d’autant plus inquiétante que les collectivités territoriales représentent environ 70 % de l’investissement public civil en France. Avec ces nouvelles restrictions, la relance économique locale se voit ainsi lourdement compromise.

Renforcer l’autonomie pour éviter la récession

Pour André Laignel, l’autonomie financière des collectivités représente un pilier indispensable pour contrer une récession locale. L’indexation de la Dotation Globale de Fonctionnement sur l’inflation est nécessaire afin de compenser les pertes subies, tout comme la création d’un nouvel impôt local pour stabiliser les recettes des communes. Selon l’AMF, ces mesures sont essentielles pour éviter que les collectivités ne se retrouvent dans l’impossibilité de faire face aux charges imposées par l’État.

En défendant le principe de subsidiarité, André Laignel rappelle l’importance de déléguer aux collectivités locales les compétences nécessaires pour agir avec réactivité et efficacité. C’est en rapprochant le pouvoir des réalités locales que les élus pourront pleinement répondre aux attentes citoyennes.

Restaurer la démocratie locale

Au-delà des finances, André Laignel voit dans cette situation un enjeu fondamental pour la démocratie. La recentralisation des pouvoirs affaiblit, selon lui, la confiance des citoyens dans leurs représentants locaux. Contraints de répondre aux attentes sans disposer des moyens nécessaires, les maires voient leur crédibilité menacée, ce qui pourrait fragiliser, à terme, le modèle républicain.

Pour restaurer cette confiance, le vice-président de l’AMF invoque le principe de subsidiarité, qui consiste à confier aux niveaux de gouvernance les plus proches des citoyens les responsabilités les plus adaptées. La nouvelle équipe gouvernementale, notamment Catherine Vautrin, ministre déléguée aux Territoires, doit, espère-t-il, saisir ce besoin essentiel et instaurer un partenariat respectueux entre l’État et les collectivités.

Un avenir incertain, mais une détermination intacte

Malgré les obstacles, André Laignel conserve un optimisme inébranlable. Il espère qu’une réforme du statut de l’élu local aboutira d’ici 2025 pour améliorer les conditions d’exercice de leur mandat et encourager de nouveaux candidats à s’engager. « Gageons que le prochain mandat ne sera pas celui de la continuité des nombreuses crises survenues », a-t-il confié. En restaurant l’autonomie locale et en soutenant les initiatives des maires, il est convaincu que la démocratie de proximité pourra pleinement remplir son rôle et resserrer le lien avec les citoyens.

L’avenir de la démocratie locale dépend aujourd’hui des choix budgétaires de l’État, mais aussi de la détermination des élus locaux à défendre leur autonomie. Dans cette période de recentralisation, André Laignel, aux côtés des élus locaux, insiste sur la nécessité d’un rééquilibrage urgent des pouvoirs entre l’État et les collectivités. Au cœur des échanges dans les mois à venir, leur autonomie et leur rôle moteur dans la relance économique devront trouver une place prépondérante. Il s’agit d’une question de survie démocratique : permettre aux collectivités de reprendre pleinement leur destin en main pour construire des solutions adaptées aux réalités locales.

Sources

  • Interview d’André Laignel, Maires de France, 31 octobre 2024
  • Entretien d’André Laignel, Franceinfo, 5 novembre 2024
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