Enseignement rural en péril : Mélanie Thomin interpelle le ministre

Mélanie Thomin, députée du Finistère, a interpellé le ministre de l’Éducation nationale par le biais d’une question écrite publiée au Journal Officiel le 7 mars dernier. Elle a exprimé ses préoccupations concernant la possible fermeture de classes dans le département. La députée a souligné l’impact négatif que cela aurait sur les familles et les équipes enseignantes. Mélanie Thomin demande au ministre de geler les suppressions de classes et de postes d’enseignants dans le Finistère et appelle à une réflexion globale, en collaboration avec les acteurs locaux, pour repenser l’offre éducative dans les zones rurales.

Question posée par Mélanie Thomin, députée du Finistère : 

Mme Mélanie Thomin alerte M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur la nécessité de maintenir le dispositif de l’enseignement public dans le département du Finistère en particulier pour le premier degré. En juillet 2022, Mme la députée avait déjà interrogé M. le ministre sur la carte scolaire pour la rentrée 2022 et lui demandait si le Gouvernement comptait adopter une stratégie différenciée pour les territoires ruraux. Ces derniers subissent souvent des effets de seuil défavorables compte tenu de l’affaiblissement temporaire des effectifs d’élèves. La direction académique envisage désormais la fermeture de 35 classes en Finistère dont 9 dans la sixième circonscription, en zone de revitalisation rurale (ZRR) ou périphériques de celle-ci. Les communes touchées seraient Crozon, Irvillac, Lanvéoc, Loperhet, Pleyben, Plougastel, Pont-de-Buis et Rosnoën. À travers le Finistère, ces perspectives inquiètent les familles et les équipes enseignantes. Bien qu’en dessous des seuils nationaux en matière de nombre moyen d’élèves par division, l’expérience concrète est encore délicate par endroit et les besoins pédagogiques sont forts. En particulier, le cumul de niveaux d’enseignement au sein d’une même classe, la concentration d’élèves en situation de handicap nécessitant la présence d’un accompagnant, le manque d’unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) demeurent générateurs de tensions et de fragilités pour la communauté éducative. Si cette nouvelle carte scolaire est entérinée, le Finistère subirait un changement de trajectoire néfaste, alors que le département connaît un dynamisme économique positif et prometteur. À ce titre, le développement du réseau éducatif est un facteur surdéterminant des autres politiques publiques de vitalisation des territoires ruraux. L’école est souvent en cœur de bourg, à proximité des commerces, à côté de la poste, si elle n’a pas fermé. Or ces territoires subissent déjà de manière disproportionnée le choc récent de l’inflation qui contraint le pouvoir d’achat des ménages ruraux. Ceux-ci sont en outre les premières victimes du recul de l’accès aux soins et de la réalité des « déserts médicaux ». Désormais, c’est l’accès à l’éducation qui y est menacé. La possibilité pour des familles de s’installer sur le territoire et avec elles le développement la vie rurale est aujourd’hui un enjeu vital pour les politiques publiques. En particulier, la baisse de la démographie d’élèves en Finistère, mise en avant par le rectorat et la direction académique, révèle davantage la persistance de barrières à l’accès au logement pour les familles qu’un manque d’attractivité du territoire sur le long terme. Alors que le coût du logement connaît une inflation particulière, synonyme d’une éviction progressive des résidents annuels en zone littorale et touristique, les investissements significatifs des communes se heurtent au manque de régulation de l’État. L’approche Gouvernementale souffre autant d’un manque de volontarisme que d’une vision de la décentralisation peu propice à la différenciation et l’adaptation aux territoires ruraux. Pourtant, l’éducation rurale est un investissement d’avenir. C’est pourquoi elle demande au ministre s’il va geler toute suppression de classe et de poste d’enseignant dans le Finistère et engager en concertation avec les acteurs territoriaux une réflexion globale sur l’offre éducative dans les zones rurales.

Réponse publiée au Journal Officiel le 13/06/2023

En 2023 avec plus de 59 Mds €, le budget du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse (MENJ) est en croissance de 6,5 % sur le périmètre de l’enseignement scolaire. Il s’agit d’une hausse historique des moyens, qui prolonge et accentue une hausse continue depuis 2017. Ce budget reste le premier budget de l’État. Or, l’organisation de l’éducation nationale doit prendre acte d’une tendance démographique majeure. En moins de dix ans, la France est passée de 830 000 à 738 000 naissances par an. Après une baisse démographique de 300 000 élèves sur les cinq dernières années, 500 000 élèves de moins sont attendus d’ici à 2027. Concrétisation de la priorité donnée à l’école, le Gouvernement fait le choix de préserver les moyens d’enseignement en s’appuyant sur les évolutions démographiques en faveur de redéploiements permettant d’améliorer les taux d’encadrement du premier degré, de stabiliser ceux du second degré et poursuivre les politiques prioritaires. Cette forte baisse de la démographie des élèves n’a ainsi qu’un effet réduit sur les emplois du ministère en 2023 dont la baisse globale sera de 2 000 emplois (soit – 0,19 % de l’ensemble des postes du ministère). De ce fait, le taux d’encadrement continuera à s’améliorer, notamment dans le premier degré. Grâce à la limitation de l’impact de la baisse démographique, il sera possible de redéployer des emplois pour les flécher sur les priorités de la politique éducative. Dans ce contexte de forte baisse démographique, l’enseignement du premier degré public a connu une baisse 278 000 élèves entre 2017 et 2022. Au niveau national, le nombre d’élèves par classe (E/C) s’est amélioré partout depuis 2017. Ainsi, le E/C est passé de 23,23 à la rentrée 2017 à 21,66 à la rentrée 2022. Dans le département du Finistère, en dépit d’un contexte de baisse démographique des effectifs d’élèves, soit 4 393 élèves de moins (- 8,3 %) depuis la rentrée 2017, les taux d’encadrement ont été améliorés : ainsi, le nombre d’élèves par classe (E/C) était de 21,53 à la rentrée 2022, plus favorable que la moyenne nationale et en amélioration par rapport à la rentrée 2017 où il était de 22,27. Le nombre de postes pour cent élèves (P/E) du département a connu également une progression : il est passé de 5,48 à la rentrée 2017 à 5,84 à la rentrée 2022. À la rentrée 2023, les prévisions d’effectifs confirment la baisse démographique continue avec 723 élèves de moins attendus dans les écoles du département. Le taux d’encadrement global devrait se maintenir à 5,85 postes d’enseignant pour 100 élèves et se situer au-dessus de la moyenne académique. La carte scolaire de la rentrée scolaire 2023-2024 a été construite au terme de près de 50 consultations menées avec les grands élus, les maires, les élus locaux et des audiences accordées aux parents d’élèves. Ces rencontres ont permis de préciser le contexte dans lequel la carte scolaire de la prochaine rentrée interviendra, les critères qui ont été retenus et enfin les priorités qui ont guidé ce travail mené depuis plus de trois mois par la direction des services de l’éducation nationale du Finistère. Une attention particulière a été portée aux écoles situées dans un environnement social défavorisé ou en zone rurale isolée. Les priorités retenues ont été axées sur la prise en compte des élèves à besoins éducatifs particuliers ou en situation de handicap. Le développement du réseau bilingue a été poursuivi, avec la création de 9 nouvelles filières. L’accompagnement et la formation des enseignants sont confortés. De même que les moyens consacrés au remplacement des professeurs absents, au service de la continuité des apprentissages. Les travaux menés ont eu pour objectif de garantir une couverture éducative équilibrée du Finistère en s’attachant aux territoires fragilisés, avec un souci de préserver le public accueilli et les communes concernées. La qualité des enseignements dispensés aux élèves continuera à être confortée par les mesures qualitatives spécifiques adoptées (école inclusive, formation, accompagnement des enseignants et le remplacement). Plus particulièrement, le nombre moyen d’élèves par classe après la mesure de rentrée sera de 19,67 à l’école Lucie Aubrac de Pont-de-Buis ; 21,13 à l’école Jean Jaurès de Crozon (avec, sous réserve d’effectifs, un projet d’ouverture dans cette école d’une filière bilingue) ; 22 à l’école Per-Jakez Hélias à Pleyben, 22,20 à l’école Yves Offret à Lanvéoc ; 22,25 à l’école du Roz à Rosnoën ; 22,44 à l’école Ker Avel et 22,92 à l’école Mona Ozouf à Plougastel ; 23 à l’école Léontine Drapier-Cadec à Irvillac et 23,25 à l’école Eric Tabarly à Loperhet. Par ailleurs, les 42 postes dédiés aux unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) dans le département seront maintenus à la rentrée prochaine. Enfin, comme chaque année, si le processus de préparation de rentrée commence en janvier, il se poursuit jusqu’à la rentrée de septembre dans un dialogue continu avec les élus et un suivi très attentif des évolutions éventuelles d’effectifs. Par ailleurs, conformément à l’engagement présidentiel pris en 2019, aucune école rurale ne peut fermer sans l’accord préalable du maire de la commune.

Force est de constater que cette réponse du ministère ne répond pas aux préoccupations exprimées par Mélanie Thomin concernant le maintien de l’enseignement public dans le Finistère, notamment pour le premier degré, et les conséquences négatives des seuils dans les zones rurales. Bien que des chiffres et des orientations générales aient été présentés, des interrogations subsistent quant à l’adaptation de l’offre éducative dans ces zones et à la prise en compte des besoins pédagogiques spécifiques.

Il est indéniable que cette situation nécessite une réflexion approfondie et une véritable concertation avec les acteurs territoriaux.  Il est impératif de mettre en place une démarche proactive visant à trouver des solutions adaptées et durables à ces enjeux cruciaux. Une concertation permettra de prendre pleinement en compte les besoins spécifiques des zones rurales et de développer une offre éducative répondant aux attentes des familles et aux exigences pédagogiques. La préservation d’un enseignement de qualité sur notre territoire revêt une importance primordiale pour assurer un développement équilibré et dynamique des communautés rurales.

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