« Le maire est le pivot de la prévention de la délinquance dans sa commune ». La phrase est martelée noir sur blanc dans la nouvelle circulaire du ministère de l’Intérieur, adressée aux préfets. Mais à la lecture des chiffres, l’équation laisse songeur : les communes sont appelées à intervenir plus tôt, plus largement, plus intensément… avec moins de crédits.
Publié le 10 juin, le texte fixe les priorités d’utilisation du Fonds Interministériel de Prévention de la Délinquance pour 2025. En façade, il réaffirme l’ambition d’agir sur les causes. Mais sur le fond, ce sont les collectivités qui se retrouvent à porter le poids des réponses. L’enveloppe globale mobilisable atteint 74,4 millions d’euros : 52,7 millions pour les actions de prévention générale, 21,7 millions pour la vidéoprotection. En 2024, cette enveloppe s’élevait à 87,4 millions. Soit une baisse de 15 %, due à une mise en réserve budgétaire de 13 millions. L’exécutif parle de stabilité. Sur le terrain, c’est une cure d’austérité.
Les élus locaux sont omniprésents dans le texte. Et au premier rang : les maires. À eux d’assurer la coordination locale, de faire remonter les priorités, de coproduire la sécurité du quotidien. Le périmètre est large : prévention du décrochage scolaire, des violences intrafamiliales, du harcèlement en ligne, sensibilisation aux addictions, soutien à la parentalité, accompagnement à la citoyenneté. Jusqu’à la promotion des compétences psychosociales pour prévenir la récidive. Le ministère voit les communes comme des couteaux suisses de la prévention, capables d’intervenir à tous les âges, sur tous les fronts.
Côté équipement, la vidéosurveillance reste une priorité. Les préfets sont appelés à soutenir les projets matures, techniquement prêts à être engagés rapidement. Il est toutefois rappelé qu’aucun cadre légal ne permet aujourd’hui l’utilisation de traitements algorithmiques couplés à ces dispositifs. Les collectivités devront donc désactiver ces fonctions, même lorsqu’elles sont embarquées dans les caméras.
La sécurisation des lieux de culte reste également un axe fort, alors que les actes antireligieux ont connu une forte hausse au premier trimestre. Les actes antimusulmans ont progressé de 72 %, selon le ministère. Des plateformes de signalement sont en cours de déploiement. Les préfets devront veiller à un équilibre des soutiens entre les différents cultes, en lien avec les services de renseignement.
La Stratégie nationale de prévention de la délinquance est annoncée pour les prochaines semaines. Elle devrait renforcer encore le rôle du maire dans les instances locales. Mais rien ne dit que les communes auront davantage de prise sur les choix politiques ou les enveloppes. Derrière la rhétorique de la responsabilisation, c’est une recentralisation implicite qui se dessine, avec les préfets comme arbitres budgétaires, et les maires comme exécutants d’un agenda décidé ailleurs.
La circulaire officielle FIPD 2025 est disponible ci-dessous.