Lors de la séance plénière du Conseil départemental le 9 janvier, Kévin Faure, co-président de Finistère & Solidaires, a ouvert le débat en pointant les dérives politiques nationales et les choix discutables de la majorité départementale. Dans un contexte marqué par le narcotrafic, la montée de l’extrême droite et une pression budgétaire croissante, son intervention a plaidé pour des orientations responsables et une solidarité à la hauteur des attentes des Finistériens.
Retrouvez ci-dessous l’intégralité de son intervention ainsi que son analyse sur la séance.
« Merci, monsieur le président, chers collègues, mesdames et messieurs,
Tout d’abord, en ce début janvier 2025, je vous adresse, ainsi qu’à l’ensemble des élus et agents présents ici ou à distance, et aux Finistériens qui nous observent, mes meilleurs vœux au nom des 22 élus, « Finistère et Solidaires ».
Dans un contexte économique, politique, social lourd, ce sont des vœux d’espoir pour toutes et tous que je formule.
De l’espoir et des bons vœux c’est également tout ce que l’on souhaite à la population mahoraise, qui a subi une véritable catastrophe humaine, sociale et territoriale.
Hélas, ces catastrophes climatiques s’intensifient du fait du dérèglement climatique. Nous appelons encore une fois à une prise de conscience forte et rapide.
Aux crises locales subies par Mayotte depuis des années, une aide urgente est à organiser avec une confiance de tous les acteurs pour permettre le retour d’une stabilité et accompagner durablement la reconstruction.
En ce début d’année 2025, nous tenons ici notre séance plénière. Et force est de constater que nos quatre dernières séances se sont tenues avec quatre premiers ministres différents ; témoignage de l’instabilité politique nationale que nous subissons tous et dont le chef de l’état est le seul responsable. Il l’a même admis lors du passage à la nouvelle année.
Alors, comment redonner confiance aux Français, aux Finistériens ? Comment donner un cap ? Donner du sens à l’action publique, à tous ceux qui avaient exprimé un espoir d’une meilleure écoute lors du scrutin électoral des européennes, puis du scrutin des législatives anticipées, et dont l’espoir a été bafoué ?
La confiance dans l’action publique se meurt des désordres théâtralisés sur la scène nationale, jetant le discrédit sur toute la classe politique nationale et locale.
Les mobilisations citoyennes des dernières années et des derniers mois, si elles ne sont pas suivies d’actions concrètes, rapides et efficaces pour le quotidien de nos concitoyens, se poursuivront, s’intensifieront et nul ne sait prédire comment cela aboutira.
La confiance dans l’action publique, vous l’avez rappelé, monsieur le président, c’est aussi agir pour éviter que plane systématiquement un doute sur les actions des élus qui agissent pour l’intérêt général.
Bien sûr que l’action publique doit être protégée de l’action de celles et ceux qui confondent intérêt personnel et intérêt général. En revanche, comment concevoir les conflits d’intérêts quand on agit par un mandat d’intérêt général, pour l’intérêt général ?
En cela, j’apporte mon soutien à tous les élus qui sont poursuivis pour des suspicions et nous aurons l’occasion de voter une motion, tout à l’heure, vous l’avez rappelé, en ce sens.
Fixer un cap, donner du sens, c’est le but également du débat d’orientation budgétaire auquel nous sommes invités aujourd’hui.
Sans budget national, nous conviendrons tous que nous allons réaliser un exercice d’équilibriste, voire de cartomanciens, astrologues, non pas pour dresser les fondements de nos orientations budgétaires, mais pour en connaître leur capacité réelle et leur portée en 2025.
Néanmoins à l’addition des crises dont vous comme moi, depuis le début de ce mandat, dressé à chaque début de séance la liste et leurs conséquences.
Il est désormais temps de s’atteler aux urgences que tout cela provoque.
Pourquoi est-ce que je parle d’urgence ? Parce que les facteurs d’alerte sont nombreux et se multiplient. J’en évoquerai quelques-uns.
Nous pouvions, jusqu’à présent, nous réjouir, humblement, ces dernières années, que notre département, notre région, étaient épargnées de certains sujets nationaux.
Qui aurait pu penser que le narcotrafic prendrait une place si importante désormais, à notre pointe Finistère, avec tout ce que cela comporte comme problématiques de vie en société, de santé publique, de violence et de crime organisé ? En la matière, j’invite toutes et tous à lire le rapport du sénateur Durain, qui pose les bases très claires dont on espère que le couple Darmanin- Retailleau se saisira rapidement, car, après les périodes d’annonces, et encore plus qu’alors que les gouvernements ont des durées de vie incertaine, il est urgent d’agir nationalement.
Qui aurait pu penser il y a quelques années que l’extrême-droite augmenterait ses scores électoraux en Bretagne et en Finistère ? Pourtant, on le constate désormais à chaque scrutin, preuve que les idées d’extrême droite, elles, ne sont pas mortes.
Qui aurait pu penser que, depuis la pointe bretonne, des influenceurs faisaient l’apologie du terrorisme ?
Qui aurait pu penser, mesdames et messieurs, que la prostitution, notamment la prostitution des mineurs, s’intensifiera ici en Finistère. Armelle Huruguen y reviendra tout à l’heure dans des échanges sur le débat d’orientation budgétaire.
Le Finistère, notre département, longtemps préservé par ces dynamiques et difficultés nationales se trouve désormais contaminés par ces phénomènes.
Alors, puisque c’est l’occasion de poser les bases et de fixer les grandes orientations qui feront le budget 2025 de notre collectivité, il sera bon de répondre à plusieurs questions.
Savoir si, comme Christelle Morançais, présidente de la région Pays-de-la-Loire et vice-présidente du parti horizon, dont vous dites être proche, vous choisirez la culture pour y faire des coupes budgétaires franches.
Savoir si vous poursuivrez l’intensification de dépenses dans des compétences non obligatoires, parfois sans véritable levier, pour lutter efficacement contre les maux qui nous contaminent.
Savoir si vos musclerez le rapport de force avec l’état sur les transferts de charges non compensées. Vous aviez l’habitude par le passé, de nier ce désengagement progressif de l’état. Je me réjouis désormais que, depuis ces derniers mois, vous vous en rendiez enfin compte.
Savoir si vous répondrez au courrier des acteurs du médico-social que nous avons tous reçu et qui vous interpellent pour savoir quel modèle de solidarité vous défendez ? Quelle place pour les associations finistériennes à l’heure où le département ouvre la porte à des structures nationales ? Ce n’est pas moi qui le dis, qui utilise le mot solidarité à toutes les sauces, ce sont les acteurs du médico-social.
Ces questions sont précises et méritent une réponse particulièrement claire, qui doit se traduire par des orientations budgétaires tout aussi claires.
Et enfin, savoir si la doctrine de Gilles Mounier, exprimée en commission lundi, sera également la vôtre, à savoir : regardons devant, pas derrière, vous qui aimez tant parler du passé.
Enfin, et nous aurons l’occasion d’y revenir plus tard dans le débat, probablement lorsque nous évoquerons le pacte Finistère 2030, nous avons déposé, et soutenus par la moitié des élus de cette salle, une demande de mission d’information et d’évaluation sur l’instruction des projets des volets 1 et 2 du pacte Finistère 2030.
J’espère sincèrement que cette mission pourra voir le jour pour factualiser de manière très précise et honnête la réalité de cette contractualisation indispensable entre le département et les collectivités finistériennes. J’y reviendrai tout à l’heure avec Tristan Foveau.
Les différents graphiques des documents présentés aujourd’hui en témoignent, la bulle d’air frais que notre collectivité connaît depuis fin 2020 est désormais épuisée et le département du Finistère se retrouve désormais dans une situation budgétaire globalement proche d’une forme de normalité, au regard de la moyenne des dix dernières années.
Cette situation budgétaire fragile, comme tous les départements de France, est celle d’un effet ciseau qui est tout sauf nouveau. Une attrition des recettes attribuées aux départements, alors que les dépenses de fonctionnement augmentent significativement.
L’incertitude budgétaire nationale est un facteur de flou dans la capacité à préparer le budget 2025.
Néanmoins, nous disposons de certaines certitudes connues depuis des années. Nos dépenses de fonctionnement évolueront et évoluent en fonction des besoins des Finistériens, les aides individuelles de solidarité, la situation de l’enfance et de la parentalité qui se dégradent, le vieillissement de notre population. On le sait, les dépenses de fonctionnement augmenteront. Alors même que les recettes dont nous disposons et disposerons ne suivront pas la même tendance, puisqu’elles sont basées sur des dynamiques fiscales globalement déconnectées des besoins des habitants.
Le financement des départements est tout sauf un cercle vertueux, puisque la consommation augmente et les transactions immobilières augmentent. En gros, plus la population dépense, investit, plus nous collectons de ressources pour répondre aux besoins de solidarité.
Mais les besoins solidarité augmentent quand la situation se dégrade et que, justement, la population peut moins consommer et moins investir.
En tirant ce modèle nous n’avons pas les ressources adaptées au moment où nous en avons besoin pour accompagner les Finistériens.
Alors, à la nécessaire refonte des modèles de financement de la santé publique de notre pays, additionnée à la nécessaire refonte urgente du modèle de financement de la dépendance dans notre pays, nous devrions ajouter la nécessaire refonte du modèle de financement des collectivités départementales, avec une réforme fiscale digne de ce nom permettant de transformer le cercle vicieux du
Financement des conseils départementaux en cercle vertueux et davantage conforme aux règles constitutionnelles.
En attendant, ces hypothétiques refontes à l’échelle nationale, nous devons continuer d’agir avec les ressources dont nous disposons pour répondre aux attentes de 2025 pour le quotidien des Finistériens.
Répondre aux urgences, porter des orientations claires, agir avec transparence : voici les trois axes que nous appelons de nos vœux pour cette nouvelle année. En tout cas, c’est ce qui anime ici les élus « Finistère et Solidaires » comme depuis ces trois dernières années, et nous le démontrerons encore aujourd’hui en intervenant à plusieurs voix. »