Alors que la politique de cohésion de l’Union européenne est essentielle pour le développement régional, les élus locaux doivent faire face à des incertitudes quant à son avenir. Récemment, 120 régions européennes ont manifesté leurs inquiétudes à Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, concernant des changements potentiels dans la gestion de ces fonds. Quelles sont les implications de ces évolutions pour les collectivités locales et pourquoi est-il important de rester vigilants et proactifs ?
Le 24 juin 2024, une coalition de 120 régions européennes, dont la région Bretagne, a adressé une lettre à Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, pour exprimer leur ferme attachement à la politique de cohésion. Cette démarche, à l’initiative de la région Nouvelle-Aquitaine, cherche à empêcher l’intégration de cette politique dans un portefeuille plus large consacré à l’investissement. Une telle centralisation des fonds pourrait réduire l’autonomie régionale dans la gestion des projets et limiter la capacité des collectivités à répondre aux besoins spécifiques de leurs territoires.
Les rumeurs suggèrent que la politique de cohésion pourrait être fusionnée avec des programmes nationaux de grande envergure, comme la facilité pour la reprise et la résilience (FRR). Une telle approche centralisée pourrait négliger les spécificités locales, essentielles pour une gestion efficace des fonds de cohésion. Pour Marie-Pierre Mesplède, chargée de la représentation de la Nouvelle-Aquitaine à Bruxelles, cette centralisation risquerait de négliger la cohésion territoriale, un pilier indispensable pour le développement harmonieux des régions.
Marie-Pierre Mesplède explique que la gestion régionale de la politique de cohésion permet une adaptation fine aux réalités locales, une flexibilité que la centralisation ne peut offrir. « Centraliser les fonds sous un portefeuille d’investissement national ignore les spécificités et les besoins uniques de chaque région, » affirme-t-elle. Cette centralisation pourrait entraîner une perte de contrôle local sur les projets, compliquant l’atteinte des objectifs régionaux et réduisant l’efficacité des initiatives locales.
Les élus locaux partagent cette inquiétude. Ils redoutent que la centralisation ne modifie la dynamique actuelle de la politique de cohésion, fondée sur la proximité et la flexibilité. Ils craignent également que cette approche centralisée entraîne des retards dans l’allocation des fonds et complique la mise en œuvre des projets, des aspects particulièrement préoccupants pour les régions qui dépendent de ces financements pour stimuler leur développement économique et social.
Pour les collectivités locales, les fonds européens soutiennent des projets variés, allant de l’infrastructure à l’innovation. Une gestion centralisée réduirait l’accès direct à ces fonds, rendant les projets locaux plus dépendants des réformes nationales. Les élus locaux doivent donc rester vigilants et défendre activement les intérêts de leurs territoires.
La politique de cohésion actuelle, couvrant la période 2021-2027, dispose d’un budget de 390 milliards d’euros, représentant un tiers du budget de l’UE. Selon le 9e rapport sur la cohésion publié en mars 2024, cette politique a considérablement contribué à réduire les disparités économiques et sociales entre les régions européennes, notamment en Europe centrale et de l’Est. Les investissements dans la transition verte et numérique sont également prioritaires, avec plus de 100 milliards d’euros alloués à des projets environnementaux et 40 milliards d’euros pour la numérisation.
Les discussions sur l’avenir de la politique de cohésion après 2027 ont déjà commencé et la Commission européenne travaille avec divers experts et parties prenantes pour définir les orientations futures. Un rapport du groupe d’experts de la Commission, publié en février 2024, et le Forum Cohésion tenu en avril dernier, ont souligné l’importance de cette politique comme pilier de l’UE, tout en s’adaptant aux nouveaux défis, y compris l’élargissement potentiel de l’UE à de nouveaux membres comme l’Ukraine.
Les enjeux actuels autour de la politique de cohésion de l’Union européenne révèlent une tension palpable entre la centralisation proposée et le besoin impérieux de maintenir une approche locale et adaptable. Alors que les régions européennes expriment leur préoccupation face à des changements potentiels, il est essentiel que les collectivités locales restent vigilantes et proactives. En défendant fermement leur capacité à gérer les fonds de manière autonome et en adaptant les politiques aux réalités locales, les élus locaux peuvent non seulement préserver la cohésion territoriale mais également renforcer l’efficacité des investissements européens dans le développement régional. La voix des régions doit continuer à être entendue à Bruxelles pour garantir un avenir où la politique de cohésion demeure un moteur essentiel de croissance inclusive et durable à travers toute l’Europe.