Les maires de France face à un ensemble de défis : Charge de travail, rémunération, sécurité et continuité

L’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, en partenariat avec le ministère chargé des Collectivités territoriales et de la Ruralité, a mené une enquête en ligne d’envergure inédite entre le 19 septembre et le 12 octobre 2023. Supervisée par le CEVIPOF, cette enquête a recueilli les réponses de 33 322 maires, obtenant ainsi un taux de réponse de 18 % (5 980 réponses complètes) et 24 % en incluant les réponses partielles (7 992 maires).

Cette participation historique à l’enquête en dit long sur les préoccupations des maires français. Cela s’est produit dans un contexte particulier, avec des émeutes ayant touché environ 535 communes en début d’été. De plus, le nombre croissant de démissions de maires suscite des inquiétudes quant à l’avenir de la fonction municipale.

En ce qui concerne le profil des maires actuellement en exercice, il se dégage une image bien définie. Avec une moyenne d’âge de 60 ans, soit deux ans de moins que dans le mandat précédent, ils sont maintenant à 40 % des retraités, en baisse par rapport à 50 % dans le mandat précédent. La majorité d’entre eux sont des hommes (8 sur 10), élus dès le premier tour dans 85 % des cas, et impliqués dans des fonctions au sein de leur intercommunalité.

Cette diversité de profils parmi les maires est révélatrice des enjeux variés auxquels ils font face. Parmi ces enjeux, la charge de travail occupe une place centrale. Elle varie considérablement en fonction de la taille de la commune, allant de 25 heures pour les maires de petites communes à 50 heures pour les maires de communes de plus de 9 000 habitants. Cette charge de travail, en comparaison avec les indemnités perçues, soulève des questions majeures. Le taux horaire moyen est de 10,9 €/heure pour les maires des communes de moins de 500 habitants, soit l’équivalent du SMIC horaire en juillet 2023. En revanche, il s’élève à 20,4 €/heure pour les maires des communes de plus de 50 000 habitants. Cette disparité met en évidence un malaise grandissant, avec 48 % des maires interrogés estimant que leur indemnité est insuffisante, comparé à 25 % en 2020.

L’un des défis majeurs auxquels font face les maires est la compatibilité de leur indemnité avec une activité professionnelle en parallèle. Cette question est particulièrement préoccupante pour les 20 000 maires exerçant une activité professionnelle en même temps que leur mandat municipal, soit deux tiers à temps plein et un tiers à temps partiel. En vue des élections de 2026, les maires suggèrent trois leviers pour encourager l’engagement futur des conseillers municipaux : la revalorisation de l’indemnité (50 %), l’augmentation du crédit d’heures accordé par les entreprises (20 %) et l’instauration d’un nombre minimum obligatoire d’absences prises en charge financièrement par l’entreprise (17 %).

Au-delà de ces préoccupations liées à leur fonction, les maires font également face à une augmentation inquiétante des agressions à leur encontre. Les données du ministère de l’Intérieur révèlent une augmentation de 32 % des agressions contre les élus, principalement les maires, entre 2021 et 2022, totalisant 2265 plaintes et signalements. Ces chiffres ne font qu’accentuer les craintes des maires, d’autant plus que 69 % d’entre eux déclarent avoir déjà été victimes d’incivilités, soit une augmentation de 16 points par rapport à 2020. Les insultes et injures ont augmenté de 10 points, atteignant 39 %, tandis que les attaques et menaces sur les réseaux sociaux ont augmenté de 7 points, atteignant 27 %. Ces agressions ne touchent pas seulement les maires, mais également leur entourage familial, comme l’ont rapporté 12 % des maires.

Pour la première fois cette année, l’enquête a mesuré le sentiment d’insécurité parmi les maires. Les résultats indiquent que 15 % des élus ressentent un sentiment d’insécurité, légèrement supérieur à celui de la population générale (11 % selon une enquête de l’INSEE sur le « Cadre de vie et sécurité »). Ce sentiment est corrélé au niveau de délits dans la commune, atteignant un maximum dans les communes de 9 000 habitants, avant de diminuer au-delà de ce seuil.

En parallèle, le nombre de démissions de maires est en hausse, avec environ 1 300 démissions depuis juin 2020, soit un rythme de 450 démissions par an, en augmentation par rapport à la précédente mandature (350 démissions par an). Face à cette tendance inquiétante, les maires ont évoqué des mesures potentielles pour prévenir une crise de vocation. Parmi celles-ci figurent l’augmentation de l’indemnité des élus (20 %), la création d’un fonds financé par l’État pour soutenir les communes dans leurs dépenses liées aux mandats locaux (16 %), l’augmentation de la compensation pour perte de revenus (14 %) et le renforcement de la dotation particulière pour les élus locaux (13,5 %).

Cette enquête met en évidence les nombreux défis auxquels font face les maires de France, qu’il s’agisse de leur charge de travail, de leur rémunération, de leur sécurité personnelle ou de leur maintien en poste. Ces résultats appellent à une réflexion approfondie sur la nécessité d’améliorer le soutien aux maires dans l’exercice de leurs fonctions locales.

Pour consulter la synthèse des résltats de l’enquête, cliquez ici.

Source

Posted in Vie de l'élu(e).