L’indignation gronde chez les élus locaux. La publication récente du rapport accablant de la Cour des comptes sur l’état des finances locales a agité les rangs des maires. Regroupés sous l’égide de l’Association des Maires de France (AMF), ils dénoncent ce qu’ils considèrent comme une injustice flagrante, rejetant la responsabilité de la dégradation des comptes publics sur l’État.
Pour l’AMF, les collectivités locales ne peuvent être tenues pour responsables des déficits publics. Au lendemain de la diffusion du rapport de la Cour des comptes, l’association a fermement rappelé que les difficultés budgétaires actuelles sont largement dues aux décisions et à la gestion de l’État. Les magistrats financiers avaient pourtant pointé du doigt les collectivités, les accusant d’une « responsabilité prépondérante » dans la dégradation du solde des administrations publiques locales en 2023, soulignant une baisse de leur épargne de 3,9 milliards d’euros. Cependant, les maires estiment que ces accusations sont infondées et que l’exécutif tente de détourner l’attention des véritables causes, à savoir des dépenses qui relèvent en réalité des compétences de l’État.
Des compensations insuffisantes et de nouvelles charges exacerbent encore les tensions. Dans un communiqué de presse publié il y a quelques jours, l’AMF ne mâche pas ses mots en soulignant le manque de compensation pour la suppression de certaines taxes locales, comme la taxe d’habitation et la CVAE.
Il manque près d’un milliard d’euros et 750 millions d’euros annuels respectivement pour compenser ces pertes. Parallèlement, les collectivités doivent gérer de nouvelles charges, telles que la gestion du recul du trait de côte et des digues, ainsi que des dépenses non officiellement reconnues comme la sécurité et la petite enfance.
Ces charges supplémentaires, combinées aux compensations insuffisantes, montrent clairement que les collectivités locales ne sont pas à l’origine de la dégradation des comptes publics. L’AMF rappelle que les budgets des collectivités doivent être équilibrés et que leur dette, destinée uniquement à l’investissement, est stable depuis 30 ans. De plus, les collectivités locales ont déjà participé au redressement des finances publiques en supportant une baisse de la Dotation Globale de Fonctionnement de 71 milliards d’euros sur les 15 dernières années.
La présentation biaisée de la Cour des comptes soulève également des critiques. Les maires ne se contentent pas de contester les conclusions du rapport; ils dénoncent aussi une présentation qu’ils jugent « biaisée ». Selon eux, la Cour ne prend pas en compte la diversité des situations des 35 000 communes et leurs 1 250 intercommunalités. Pour les élus locaux, il est impératif de présenter de manière équitable les responsabilités de l’État dans la dégradation des déficits publics.
Le gouvernement, de son côté, n’est pas épargné par la critique. La Cour des comptes a sévèrement pointé du doigt l’exécutif, soulignant que chaque nouvelle trajectoire budgétaire se révèle plus fragile que la précédente depuis deux ans. Cette situation incite les maires à contester fermement la volonté du ministère des Finances d’imposer de nouvelles restrictions financières aux collectivités.
Les risques sur les services publics inquiètent particulièrement les élus locaux. L’AMF met en garde contre les effets désastreux qu’une nouvelle contrainte budgétaire pourrait avoir sur l’économie locale. Selon l’association, cette mesure pourrait « casser la fragile dynamique de l’investissement et réduire l’offre de services de proximité ». Les magistrats financiers ont proposé de limiter les dépenses des collectivités et de contrôler plus strictement les recettes provenant de l’État, une perspective qui inquiète profondément les élus locaux.
Par ailleurs, les régions manifestent une profonde inquiétude face à la dégradation continue de leur situation financière depuis la crise sanitaire. Elles avertissent qu’en l’absence de nouveaux financements dynamiques, elles devront réduire leurs investissements, notamment dans les secteurs clés tels que les transports et la rénovation énergétique des bâtiments. Ces domaines sont pourtant essentiels pour le développement durable et la qualité de vie des citoyens.
Enfin, une situation inquiétante pour les départements complète ce tableau préoccupant. Parmi les collectivités locales, les départements semblent les plus fragilisés. Ils subissent une chute drastique de leur épargne brute et des recettes provenant des Droits de Mutation à titre Onéreux. Les dépenses imposées par l’État depuis 2022, évaluées à 2,5 milliards d’euros, ont été décidées sans concertation, aggravant leur situation financière déjà précaire.
Les Départements de France ont également souligné une augmentation significative des dépenses sociales, telles que le RSA, l’APA, la PCH et l’ASE, sur lesquelles ils n’ont que peu de contrôle. Ils dénoncent les défaillances de l’État dans la prise en charge des problèmes de santé et de handicap, entravant ainsi leur capacité à exercer leurs responsabilités sociales et mettant en péril la protection de l’enfance. Les carences dans ces domaines mettent les départements sous une pression financière et opérationnelle croissante, rendant leur gestion quotidienne de plus en plus difficile.
Dans ce climat de contraintes budgétaires croissantes, les collectivités locales appellent à une réévaluation des responsabilités financières entre elles et l’État. Elles plaident pour une reconnaissance accrue de leurs efforts dans la gestion prudente des fonds publics. Les maires avertissent que de nouvelles restrictions budgétaires pourraient sévèrement compromettre l’accès aux services essentiels, sur lesquels les citoyens s’appuient au quotidien. Ils exhortent l’État à assumer une part équitable du fardeau financier, pour éviter de placer l’ensemble de la charge sur les épaules des autorités locales.
Face à cette situation critique, il est devenu urgent de repenser les accords financiers entre l’État et les collectivités locales. Les maires réclament un dialogue constructif et un partenariat solide, essentiels pour élaborer des solutions durables qui soutiendront le développement et le bien-être des populations locales, tout en préservant la stabilité financière des collectivités.