À moins de dix mois d’une échéance réglementaire devenue intenable, le gouvernement a choisi une solution rapide. Deux textes publiés mi-décembre au Journal officiel créent une nouvelle certification permettant d’exercer dans les établissements d’accueil du jeune enfant : celle d’« intervenant éducatif petite enfance ». Une réponse directe à la pénurie de professionnels, pensée d’abord pour les micro-crèches.
Le décret du 10 décembre modifie le Code de la santé publique en élargissant la liste des qualifications autorisées à encadrer les jeunes enfants. Aux côtés des diplômes d’État déjà reconnus, un titre professionnel « de niveau équivalent », délivré par le ministère chargé de l’emploi et inscrit au répertoire national des certifications professionnelles, fait désormais son entrée. Le texte s’applique immédiatement et concerne autant les gestionnaires de structures que les conseils départementaux chargés de leur contrôle.
Cette évolution n’est pas anodine. Un décret adopté au printemps impose, à compter du 1er septembre 2026, la présence dans chaque micro-crèche d’au moins un professionnel relevant des qualifications dites de catégorie 1. Une exigence justifiée sur le fond, mais déjà impossible à tenir dans de nombreux territoires. Faute de vivier suffisant, l’obligation menaçait de bloquer des projets, voire de fragiliser des structures existantes.
L’arrêté du 12 décembre, publié le 14, vient donner corps à la solution retenue. Il crée officiellement le titre professionnel d’intervenant éducatif petite enfance, classé au niveau 4 du cadre national des certifications. La formation repose sur trois blocs de compétences : accueil des jeunes enfants, accompagnement de leur développement, travail avec les parents et suppose un parcours de 1 400 heures, en présentiel, complété par une possible validation des acquis de l’expérience.
Le référentiel annexé affiche une ambition éducative large : posture éthique, accueil inclusif, soutien à la parentalité, prévention précoce. Sur le papier, rien n’indique un renoncement explicite à la qualité. L’arrêté prévoit même que les jurys d’examen intègrent des professionnels exerçant en collectivité, afin d’ancrer l’évaluation dans les réalités du service public.
Reste que le compromis retenu ne fait pas l’unanimité. Les organisations professionnelles de la petite enfance dénoncent une réponse jugée trop rapide à une crise structurelle. Pour elles, une certification professionnelle, même encadrée, ne saurait durablement remplacer des diplômes d’État plus longs, intégrant des apprentissages cliniques approfondis. En creux, une crainte persiste : que la norme soit respectée, mais que l’exigence éducative se redéfinisse à la baisse.
Les collectivités locales se retrouvent ainsi en première ligne. Communes et départements devront composer avec des parcours professionnels plus diversifiés, tout en restant garants de la qualité de l’accueil et de la confiance des familles. À l’approche de 2026, la question n’est donc pas seulement de rendre la règle applicable, mais de savoir ce qu’elle produit réellement sur le terrain.
Pour les élus locaux, ce nouveau cadre appelle une vigilance particulière sur l’accompagnement des équipes, les exigences posées aux gestionnaires et le dialogue avec les services départementaux, afin que la réponse à la pénurie ne se traduise pas par une fragilisation durable de la qualité d’accueil.
Car en matière de petite enfance, tenir l’obligation réglementaire ne suffit pas. Encore faut-il tenir la promesse éducative.
POUR ALLER PLUS LOIN
– Décret n° 2025-1207 du 10 décembre 2025 relatif aux qualifications des personnels chargés de l’encadrement des enfants dans les établissements d’accueil du jeune enfant.
– Arrêté du 12 décembre 2025 portant création du titre professionnel d’intervenant éducatif petite enfance.


