Réforme des politiques d’emploi, vers une gouvernance territoriale renforcée.

Aujourd’hui, le 1er juillet 2024, les collectivités locales entament leur adaptation à un nouveau cadre institutionnel découlant du récent décret n°2024-560 publié le 20 juin au Journal officiel. Ce changement marque une réorganisation majeure des politiques d’emploi, nécessitée par la fragmentation actuelle entre les différents niveaux de gouvernance. Cette réforme vise à améliorer la coordination et l’efficacité des initiatives en matière d’emploi, essentielle pour renforcer la cohésion territoriale.

 

Ce décret, issu de la loi n°2023-1196 pour le plein emploi, vise à redéfinir les comités territoriaux pour l’emploi en conférant une place prépondérante aux élus locaux. L’objectif est de permettre aux acteurs locaux de répondre plus efficacement aux défis de l’emploi et de l’insertion professionnelle sur leurs territoires.

Pour commencer, les comités régionaux pour l’emploi verront leur structure profondément modifiée. La présidence sera désormais assurée conjointement par le préfet de région et le président du conseil régional. Cette approche dualiste vise à renforcer la synergie entre les différentes instances territoriales, facilitant ainsi une prise de décision intégrée. Chaque comité régional comptera 29 membres, ou 36 pour les régions avec plus de six départements. Ces membres incluront des représentants de l’État, de la région, des départements, ainsi que des organisations syndicales et patronales. Ces comités, intégrant les fonctions des CREFOP (Comités Régionaux de l’Emploi, de la Formation et de l’Orientation Professionnelles), auront pour mission de coordonner les politiques régionales d’emploi, de formation et d’orientation professionnelle. Cela garantira une meilleure cohérence des actions sur le terrain.

En parallèle, les comités départementaux pour l’emploi suivront également une nouvelle organisation. La présidence sera partagée entre le préfet de département et le président du conseil départemental, assurant ainsi une représentation équilibrée des divers niveaux de décision. Ces comités pourront comprendre jusqu’à 27 membres, incluant des représentants de l’État, de la région, du département, des communes et de leurs groupements, ainsi que des représentants des employeurs et des syndicats de salariés. Une commission spécialisée pour l’inclusion et l’insertion par l’activité économique sera mise en place afin de coordonner les actions avec les programmes départementaux d’insertion et les plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi.

Pour faciliter leur fonctionnement, ces comités pourront se réunir par visioconférence et prendre des décisions à distance. Les résolutions seront adoptées à la majorité des suffrages exprimés, avec une voix prépondérante attribuée au représentant de l’État en cas de vote égal. Cette disposition, bien que visant à éviter les blocages décisionnels, soulève des questions quant à l’équilibre réel des pouvoirs au sein de ces comités, où l’influence de l’État pourrait potentiellement prédominer sur celle des collectivités locales.

Malgré l’inclusion des élus locaux dans les comités, plusieurs points critiques subsistent. L’augmentation du nombre de comités et de leurs membres pourrait engendrer une bureaucratisation accrue, compliquant la prise de décisions rapides et efficaces au niveau local. La participation obligatoire des élus locaux à ces comités et la nécessité de coordonner avec de nombreux acteurs différents (État, syndicats, patronats) pourraient alourdir leur charge de travail, sans garantie d’une efficacité accrue. Enfin, la nécessité de coordonner entre différents niveaux de gouvernance (région, département, communes) pourrait compliquer la mise en œuvre des politiques, surtout dans les régions à forte diversité géographique et socio-économique.

En dépit de ces défis, cette réforme marque un tournant majeur dans la manière dont les acteurs locaux façonnent et mettent en œuvre les politiques d’emploi. Elle donne aux collectivités locales un levier puissant pour adapter les initiatives nationales aux réalités et aux besoins spécifiques de leurs territoires. Dans des régions comme la Bretagne, cette réforme pourrait permettre de développer des stratégies pour stimuler l’emploi dans des secteurs clés tels que l’agroalimentaire, le numérique et le tourisme. Par exemple, des programmes de formation spécialisés peuvent être conçus pour répondre aux besoins locaux en main-d’œuvre qualifiée, en exploitant les ressources naturelles comme le potentiel des énergies marines renouvelables.

En conclusion, la réforme des Comités Territoriaux pour l’Emploi représente une avancée dans la gouvernance des politiques d’emploi. En donnant aux acteurs locaux les moyens d’adapter et d’innover selon les spécificités de leurs régions, elle ouvre la voie à une meilleure coordination et à des solutions plus efficaces pour stimuler l’emploi et soutenir le développement économique local. Toutefois, il est indispensable de veiller à ce que l’équilibre des pouvoirs soit maintenu afin de garantir une représentation équitable des collectivités locales et de l’État. Ces initiatives sont essentielles pour répondre aux besoins concrets des collectivités locales et pour renforcer leur contribution à la croissance socio-économique globale du pays.

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