Il a manqué 9 voix à la motion de censure déposée par le groupe Liot à l’Assemblée nationale pour renverser le gouvernement ce lundi, après avoir mobilisé toutes les voix de la Nupes et du Rassemblement national, quatre non-inscrits sur cinq et 19 députés LR sur 61. Sur le plan institutionnel, la Première ministre peut se féliciter d’avoir réussi son pari, puisque la réforme des retraites est adoptée, cependant sur le plan politique c’est un autre registre…
Ambiance surréaliste à l’Assemblée nationale, hier, entre 16 heures et 19 heures, avec l’absence très remarquée de nombreux députés de la majorité sur les bancs de l’assemblée. Puis d’une clôture du vote dans une ambiance glaciale par Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance, et Élisabeth Borne sous les faibles applaudissements des quelques dizaines de députés Renaissance présents. Les oppositions, en revanche, se sont montrées très offensives, entre l’oratrice du Rassemblement National lançant à ses troupes « Tenez bon, 2027 n’est plus très loin ! », celle de LFI comparant Emmanuel Macron à l’empereur romain Caligula, ou Olivier Marleix, des Républicains, s’en prenant frontalement au président de la République et à sa « méthode ».
Au compteur, un tiers des députés LR ayant choisi de ne pas suivre les consignes de leur président de groupe de ne pas voter la motion de censure, le gouvernement a senti le vent du boulet. Ce gouvernement et sa Première ministre, politiquement très affaiblie parviendront-ils à « sauver les meubles » dans les jours et les semaines à venir, alors que plusieurs textes très importants, notamment sur le travail, l’immigration, les institutions, doivent être présentés.
Dans ce contexte, il est probable des décisions ne seront sans doute pas prises avant la fin complète du parcours de la loi portant réforme des retraites. La réforme doit maintenant être examinée par le Conseil constitutionnel et les Sages auront un mois pour rendre leur avis, sauf si le gouvernement déclare l’urgence, ce délai sera réduit à huit jours. En attendant, c’est dans la rue que le gouvernement doit à présent tourner son attention, avec le maintien de grèves et de manifestations sporadiques et parfois violentes sur tout le territoire. Suite à l’annonce du rejet de la mention de censure, des rassemblements non déclarés se sont formés à Paris, Strasbourg, Dijon, Lyon, Rennes, Saint-Étienne, Lille, Bordeaux, Limoges, Poitiers, Rouen, Brest… Avec beaucoup de jeunes, non encadrés et déterminés, ce qui occasionne quelques dégradations et des heurts avec les forces de l’ordre.
Si ces manifestations, organisées sur les réseaux sociaux perdurent et deviennent quotidiennes, un réel problème de maintien de l’ordre et de disponibilité des forces de l’ordre va se poser au gouvernement.
Sur le terrain des grèves, la question des raffineries préoccupe. Selon les syndicats, il n’y a « plus aucun produit qui sort » de l’ensemble des sept raffineries du pays, dont certaines sont en grève à « 90 % ». Jusqu’à présent, seules les expéditions étaient bloquées, mais désormais, c’est également la production elle-même qui s’arrête, peu à peu. De nombreuses actions coups de poings et blocages continuent de se dérouler un peu partout sur le territoire, pour faire la jonction avec la journée de grève nationale et de manifestations appelée jeudi par l’intersyndicale, qui ne désarme pas.
Emmanuel Macron a affirmé ce mardi lors d’une réunion du camp présidentiel, qu’il n’entendait ni dissoudre l’Assemblée nationale, ni remanier le gouvernement, ni convoquer un référendum sur sa réforme des retraites pour éteindre la contestation. Il aurait demandé à ses troupes de mettre en place d’ici deux à trois semaines maximum des propositions en vue d’un changement de méthode et d’agenda des réformes.
Dans cette attente, le président de la République doit s’exprimer mercredi à 13 heures à la télévision face à deux journalistes de TF1 et France 2. L’objectif pour Emmanuel Macron « retisser le lien » avec des Français très majoritairement opposés à la réforme des retraites et choqués par les méthodes employées par le gouvernement.*