Alors que près de 40 000 personnes ont défilé dans tout le Finistère, au lendemain de la 10ème journée de grèves et de manifestations contre la réforme des retraites, nous sommes dans l’incertitude face à ce que le gouvernement envisage tant il souffle à la fois le chaud et le froid.
Côté froid, on notera la très sèche fin de non-recevoir opposée à la proposition de l’intersyndicale de nommer un « médiateur » et de faire une « pause » de quelques mois. La CFDT porteuse de cette proposition, a semble-t-il dans l’idée de demander au chef de l’État de reporter de quelques mois la mise en œuvre de la loi, le temps de tenter de trouver une sortie de crise à l’aide d’un « médiateur ». En échange, la CFDT semblait prête à mettre le mouvement de contestation, lui aussi, sur « pause », le temps de la négociation.
Au sortir du Conseil des ministres, hier, Olivier Véran a répondu au nom du président de la République qu’il n’y a « pas besoin de médiateur pour se parler », et que la loi serait appliquée dès qu’elle serait validée par le Conseil constitutionnel. Fermez le ban.
Mais en fin d’après-midi, hier, après de nouvelles manifestations qui, bien qu’en baisse par rapport à la semaine passée, restent massives, Elisabeth Borne a proposé à l’intersyndicale de la recevoir la semaine prochaine. On ignore pour l’instant ce qui sera au menu des discussions : le chef de l’État avait déjà, la semaine dernière, dit sa « disponibilité » pour discuter avec les syndicats de tout… sauf de la réforme des retraites. Il reste à savoir si le rendez-vous proposé par Élisabeth Borne sera, lui, consacré à cette réforme, ou aux autres chantiers sociaux que le gouvernement veut engager, en particulier sur le travail.
Dans les secteurs les plus mobilisés, après deux mois et demi de mobilisation, on perçoit un essoufflement. Les éboueurs de la Ville de Paris, en particulier, ont annoncé hier, qu’ils allaient suspendre la grève ce mercredi. Ceux du Havre ou de Brest, en revanche, poursuivent le mouvement. Les chiffres des grévistes sont également en baisse dans les transports, l’Éducation nationale, la fonction publique territoriale.
Cependant, le mouvement se poursuit dans les raffineries, avec des conséquences de plus en plus visibles sur les stations-services. Si la situation est pour l’instant sans commune mesure avec celle du mois d’octobre, l’essence commence à manquer dans plusieurs régions. 43 % des stations en Loire-Atlantique, et 45 % en Ille-et-Vilaine manquent au moins d’un carburant. Le gouvernement espère néanmoins que la situation va s’améliorer rapidement du fait du « déblocage » par les forces de l’ordre du dépôt de Vern-sur-Seiche, près de Rennes.
Autre motif d’inquiétude pour le gouvernement : Une mobilisation plus importante de la jeunesse, constatée depuis le recours à l’article 49-3. Plusieurs milliers de jeunes étaient présents dans les cortèges ce mardi avec notamment la présence, outre les universités et les lycées, de prestigieuses écoles comme Sciences Po.
Les manifestations ont de nouveau, en fin de cortège, été émaillées de quelques violences, notamment à Paris et Rennes. Le ministre de l’Intérieur a révélé, hier, qu’un décret est proche de la publication pour autoriser les forces de police et de gendarmerie à utiliser des drones pour les opérations de maintien de l’ordre. Cette mesure, qui avait été rejetée dans la loi pour une sécurité globale, a été présentée à nouveau sous forme d’un décret qui, selon Gérald Darmanin, est « actuellement examiné par le Conseil d’État ».